Accueil Chronique album : Juliette - Mutatis Mutandis, par Eric B
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Critique d'album

Juliette : "Mutatis Mutandis"

Juliette :

Rock

Critique écrite le 17 avril 2005 par Eric B

Pour ceux d'entre nous qui la connaissions auparavant (elle en est facile à son 4-5ème album ché plus exactement) elle nous avait habitué à des albums reposant essentiellement sur sa seule voix et son piano. Le titre de l'album "Mutatis Mutandis" (locution adverbiale latine encore usitée et signifiant "en changeant ce qui doit être changé") est un bon indice de changement total de repère dans l'inspiration musicale de la truculente Juliette.
Et d'entrée de jeu, l'album annonce la couleur avec le florilège d'instruments dans le sort de Circé qui rend parfaitement - avec la voix de l'artiste - une atmosphère inquiétante encore que envoûtante. Un sortilège ! On ne pouvait rêver meilleure entrée en matière ! La suite de l'album est placée sous le signe de la diversité. Notre rabelaisienne des temps modernes nous a concocté un ambitieux et accompli mélange des genres. On se balade entre rythmes latinos, chansons ambiance cabaret et chansons réalistes. Ce qui par contre n'a pas changé c'est la puissance évocatrice de ses textes. Ainsi que son malicieux humour qui compense la gravité des thèmes de certaines de ses chansons.J'en veux pour preuve Maudite Clochette. D'un début tout en légèreté, la chanson se termine dans un fracas de violence aussi soudaine que fugace. Le congrès des chérubins, chanson dans laquelle elle s'adonne à son numéro préféré de chanteuse-comédienne est l'exemple type de la puissance comique de Juliette. Un délice et un vrai délire ! De même que Mémère dans les orties le duo avec François Morel - 3615 qui n'en veut - qui est une véritable litanie d'insultes toutes plus inventives qu'hilarantes les unes que les autres. Tout le contraire de l'autre duo inattendu de l'album, cette fois-ci avec Guillaume Depardieu la lettre oubliée tout en douceur et fragilité, tout en émotion et sensibilité . Une chanson tragique sur les lettres d'amour que les barbus de la grande guerre envoyés à leur douce. Je dois reconnaître que la succession des voix de Guillaume et Juliette fait mouche ! Enfin, nous ne sommes pas au bout de nos surprises lorsque arrive Franciscae meae laudes chanson tout en alexandrin latin qui est en fait le seul texte de l'album non signé de l'artiste puisque c'est feu Baudelaire, lui-même, en personne qui 2 siècles + tôt l'avait pondu. Une adaptation parfaitement accomplie. In fine ;-) l'album se conclut par deux chansons à l'ambiance oppressante avec Il s'est passé quelque chose et le conte noir fantaisie héroïque.
Ainsi à travers 11 titres, Juliette a su se renouveler en allant explorer d'autres thématiques d'autre ambiances mais sans rien perdre de son authenticité, de sa voix au phrasé à nul autre pareil, sans rien abandonner de la richesse de ses textes (si bien ciselés), de ses personnages si bien campés, de son univers si attachant, de son humour pinces-sans-rire. Un régal pour les oreilles et pour l'imagination. Un mariage réussi entre le fond et la forme. Un album mélancolique et divertissant, inquiétant et malicieux. Une merveille de génie !

2005 (Polydor)

 Critique écrite le 17 avril 2005 par Eric B
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