Accueil Chronique album : Scarlett Johannson /Yorn/Sitek - Break Up / Anywhere I Lay My Head, par Philippe
Vendredi 29 mars 2024 : 6534 concerts, 27064 chroniques de concert, 5409 critiques d'album.

Critique d'album

Scarlett Johannson /Yorn/Sitek : "Break Up / Anywhere I Lay My Head"

Scarlett Johannson /Yorn/Sitek :

Pop - Rock

Critique écrite le 02 octobre 2009 par Philippe

Flute et zut, encore raté ! La créaturissime, douce, vénéneuse, marilynomorphe et sensuelle Scarlett Johannson, apparaît sur un deuxième album, et ce n'est toujours pas la révélation espérée... Accompagnant un certain Pete Yorn, songwriter folk de son état, la Divine joue, certes plutôt bien, en une figuration de luxe, sur des compositions hélas loin d'être marquantes ou même réussies. Pour un Relator assez enjouée et trompe-l'oeil de début d'album, et une balade sympa (I don't know what to do), un paquet de titres un peu plan-plan et mille fois entendus (Wear and tear, Clean etc...), d'autant que la voix chevrotante de Pete Yorn, ni aussi belle que celles de Sufjan Stevens ou Jason Lytle, ni aussi détraquée que celles de Daniel Johnston ou de Mark "Sparklehorse" Linkous, n'accroche pas spécialement l'oreille. Blackies Dead ou Shampoo sonnent donc comme autant de promesses non tenues, devenues de simples bluettes pop où aucun des deux organes ne s'impose vraiment...
Evidemment, le tout est du coup rigoureusement inoffensif et (donc) très grand public, ce qui explique l'engouement des médias branchés (LibéramInrocks), qui à la lecture de leurs textes sont au fond émoustillés par le côté glamour du projet, bien plus que par sa valeur musicale intrinsèque - faible, en l'occurence. Paradoxe ultime, la dernière chanson Someday, l'une des trois qu'on retiendrait comme intéressantes, en tant qu'héritière d'une certaine "Lou Reed Touch", se déroule quasiment entièrement sans la Belle... En tout cas rétrospectivement, on est donc bien obligé de chroniquer enfin l'autre album "avec" Scarlett Johannson qui, s'il pose un peu les mêmes problèmes, est au moins nettement plus intéressant !

Ressortons donc cet opus qu'on s'était juré de chroniquer un jour, paru l'an dernier mais postérieur au précédent : Anywhere I Lay my head. Le concept : uniquement des reprises de l'immense Tom Waits, remoulinées par le sorcier de studio Dave Sitek (bassiste et gourou des indispensables TV on the Radio), avec en chanteuse... la divine et pulpeuse Scarlett Johannson ! Evacuons les problèmes tout de suite : il y a aussi un ou deux titres dispensables, et surtout, la Sublime ne fait ici aussi que passer, chantant d'un ton détaché et peu impliqué (à ce sujet, il faudrait peut-être simplement envisager que sa voix de chanteuse n'a peut-être rien de particulièrement frappant ?!). Et pourtant cet album-ci revient avec insistance sur notre playlist depuis sa sortie en 2008. Pourquoi ? Parce que certaines des chansons, hyper-produites et assez éloignées des originales, sont pour le moins réinventées, magnifiquement reposantes et cajolantes (Town with no cheer, Anywhere I lay my head...), parfois joliment psyché 60's (Song for Jo) : un vrai bonheur en somme...
Album de producteur plutôt que réelle création, le tout relève certes un peu de l'exercice de style (cf la littéralement noyée sous les effets I dont want to grow up) et pourrait même, on l'a vu, pratiquement exister sans la Belle. Il n'empêche que la magie aérienne de l'Atmosphère de Joy Division, tout comme les choeurs fascinants des TV on the Radio, flottent sur la magique Fanning Street, et que Falling Down est elle aussi particulièrement belle. Et qu'on ré-entrevoit l'ombre de l'ogre californien au timbre rugueux sur les carillons très émouvants de I wish I was in New Orleans, en plus du potentiel enfin révélé de la voix caressante, hors de rythme et un peu déglinguée de Scarlett : c'est mal fichu et c'est juste... magnifique ! Et ce projet est aussi, pour l'avoir testé à plusieurs reprises, un album sur lequel il est particulièrement délicieux de s'endormir... On l'aura compris, celui-ci est donc beaucoup plus recommandable que l'autre !

Problème principal résultant de tout ceci, il n'est toujours pas établi clairement à ce jour si la troublante Scarlett Johannson peut vraiment, oui ou non, être bouleversante devant un micro comme elle l'est généralement instantanément devant une caméra... Si l'on osait le dire ainsi : il manque un compositeur qui ose la foutre (symboliquement) à poil devant le micro, pour chanter des choses un peu moins légères et exprimer enfin son vrai potentiel, dramatique, amoureux, hilare ou hystérique... Un point positif pour finir ? Il n'est pas exclu avec un peu de chances que, à l'instar de Juliette Lewis et ses (dispensables) Licks vus un peu partout en festival, on ait au moins un jour le plaisir de l'apercevoir sur scène, la Jeune Fille à la Perle, en chair et en os ! On pourra alors tranquillement se décomposer d'amour pour elle, sans être dérangé par une musique qui deviendra, à n'en pas douter, totalement anecdotique devant l'image sublime de sa bouche délicate sussurant dans un micro...
(Pete Yorn's, 2004 / Dave Sitek's, 2008)
Vignette Philippe

 Critique écrite le 02 octobre 2009 par Philippe
 Envoyer un message à Philippe