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Chronique de Concert

Ginger Ale + Laudanum + Invités

La Maroquinerie - Paris 18/06/2003

Critique écrite le par

C'est sur une pure intuition et très curieux de l'affaire que je m'étais rendu à la FNAC pour m'enquérir de deux places de concert pour "Ginger Ale", nom de groupe qui s'était progressivement bien imprimé dans ma tête ces dernières années à force de parcourir les programmations de soirées parigottes. Ajoutons là dessus un fort facteur déclenchant en raison de leur très bon passage en première partie de Marian Faithfull lors d'un "Music Planet2Nite" de haut vol sur Arte ; un set ébouriffant, qui avait fait tomber ma mâchoire par terre à la façon du loup de Tex Avery tant la surprise avait été bonne que l'onde intense.

Jour J dans une capitale bercée d'une douceur toute estivale, ma première découverte est celle de la "Maroquinerie", salle parfaitement intégrée à l'urbanisme du 20ième arrondissement, salle d'une dimension humaine, limite provinciale, et où l'on vous explique qu'il y a un concert en bas et une lecture en haut, un bar en bas et un bar en haut... le tout dans une ambiance associative d'une fraîcheur salvatrice et toute provinciale.

Là, immédiatement le temps suspend son vol, et l'on se rend compte au sortir de l'escalier descendant qu'à droite, la salle de concert est un peu comme le quart du Trabendo, autre salle qui m'avait récemment tapé dans l'œil en raison de cette proximité bien difficile à trouver avec le groupe dans l'ex-Lutèce devenue grande communauté non-communicante et désincarnée ; que des bonnes nouvelles au présent, et si l'on y ajoute le fait que les membres des groupes présents ce soir là peuvent se balader tranquillement dans l'espace public sans se faire prendre la tête d'une façon ou d'une autre, ça en devient tellement inespéré que le stress de la capitale sort de nos veines immédiatement et ce, au moins pour quelques heures...

LAUDANUM

En la personne d'un sympathique personnage physiquement assez "Hadji-Lazaro"-isant, Laudanum assure la première partie, entrant en scène naturellement et sans esbrouffe, sur un premier titre où son minimalisme d'intervention vis à vis du jeu des DAT aide à contrer ce que j'ai ressenti comme une timidité naturelle qui ferait en fait presque plaisir à voir dans ces temps de rock-showbizz glamrockisés. Et passée l'interrogation sur l'éventualité d'une performance aux bandes pouvant être trop présentes, on comprend vite que son set se construit peu à peu, lui laissant le temps d'être en phase avec la scène, pour une montée en puissance tant introspective qu'efficace.

Ainsi, s'il tourne parfois le dos au public au chant, on pensera plus à la timidité d'un Jim Morisson à ses débuts qu'à un quelconque dédain, et de toute façon, la sympathie est tellement évidente, que s'il existe un stress quelconque à ce moment précis, on a surtout plaisir à voir les titres monter en puissance, sans jamais céder à la facilité d'un trop "laché" d'énergie, laissant les portes ouvertes à l'entrée de bien des registres musicaux. L'électro minimaliste d'un "Trisomine21" sera capable d'intégrer toute l'évolution d'écriture que l'histoire des musiques électroniques a su apporter au cours des 20 dernières années, et même si son "sampler est à vendre, si ça intéresse quelqu'un... je peux faire un prix... il suffit de me retrouver au bar après le concert", on se plaît totalement à retrouver ces premières sonorités habilement torturées pour dresser une nouvelle épure électro-pop ou néo-punk authentique de première génération, d'un goût inespéré après tant d'années, acidifiée d'une aura aux relents happy-isants qui vous collent ce sourire indispensable, immédiatement.

Il y a donc un label intéressant sur Tours, et l'intéressé invitera le public à se rendre chez "Wave", pour trouver quelques truffes musicales précieuses au cours de la soirée. Les référents s'installement doucement, devant un public finalement assez jeune, dont je n'ai toujours pas réussi à déterminer la façon dont tout ceci pouvait bien être reçu, mais pour ma part, la jubilation était bien certaine.

Son set sera ponctué par les interventions progressives et de plus en plus nombreuses, de musiciens tout droit sortis des premiers rangs public (cette salle à cela de génial), et l'on comprend qu'on a là à faire à une de ces familles du Rock comme on les aime lorsqu'Angèle des Ginger Ale vient prêter sa voix toute Anne-Clark-isante pour l'occasion lors d'un des derniers morceaux.

Enfin, la performance du bonhomme se terminera par un long titre gorgé de guitares, très torturé dans ses lyrics, où l'on sent le visage du personnage descendre dans l'intériorité et où la scène s'électrise des plus belles heures de la coldwave, comme si l'on découvrait en direct l'énergie imaginée chez les Cures à l'époque des Faith et Seventeen Seconds. Magistral !


GINGER ALE

J'aurais donc tout juste eu le temps de parler un peu, puis de léguer mon briquet jetable (dans un grand éclat de rire) à ce sympathique personnage qui ne s'avère être "rien" d'autre le clavier des Ginger Ale avant que le concert ne commence.

Il n'y a pas à dire, mais Angèle est un personnage dont le regard m'évoque immédiatement certains clichés de Ian Curtis. Ca peut vous paraître étonnant, je ne sais pas vous dire pourquoi, mais c'est bien cohérent, même si Angèle est belle et bien un personnage à part entière, et ce, intégralement.

Bref, bref... Mais ce soir là, si nous sommes bien en France et non en Angleterre, si nous sommes bien à Paris et non à Manchester, si nous sommes bien à la Maroquinerie et pas à l'Hacienda, c'est sans doute peut-être plus en raison du statisme trop omniprésent d'un public rock français de 3/4ème génration (référent 77) qui a toujours autant de mal à danser - ou tout simplement à se lâcher si le "premier" n'y va pas - dans notre pays qu'autre chose. Car l'équation est parfaite, le son est excellent, l'alchimie fonctionne à plein, et c'est un pur moment de régal qui commence dès le premier titre.

J'y ai vu passer nombre de fantômes, auxquels j'ai eu plaisir à dire "bonjour" avec le sourire. Du son de basse de Bernard Summer aux guitares de la meilleure époque des Pixies, de la voix sucrée-acidulée des Sundays aux échos électroniques des Daft Punk du début, de l'énergie des Sisters of Mercy à la souplesse pop d'Echo & the Bunnymen, le tout porté par un batteur à faire pâlir n'importe quelle beatbox par sa régularité et son efficacité, je redécouvre avec émerveillement pourquoi pour ma part, je n'ai jamais rien associé de glauque à la cold ou l'électro, bien au contraire, et je jubile littéralement de danser dans un écho d'Hacienda tout en me disant que ce rythme là, ils sont bon pour nous représenter très prochainement au festival de Sonar à Barcelone, tant tout ce qu'ils font sonne bien, me réjouit, et coule comme une évidence tellement difficile à rencontrer.

Mention spéciale à Angèle qui introduit le single en demandant au public s'ils connaissent "Siouxsie & the Banshees", car non contente de rendre à Cléopâtre ce qui appartient à Cléopâtre, l'intelligence de la formule évite immédiatement les affres d'un éventuel débarquement du public "rien que parce que ce truc là est passé à la Ouï-radio".

Car il est juste une chose qui m'a un peu crispé : cette incapacité du public à bouger, bien que fournissant de nourris applaudissement. C'est dingue... 20 ans d'histoire musicale après, et les frenchies sont toujours autistes de leur expression corporelle... je ne comprendrais jamais ça... et j'ai depuis longtemps appris à en faire abstraction, mais quand même.

A noter, le retour temporaire de Laudanum sur scène pour un titre qui se finira dans une Apocalypse digne d'un Bertrand Cantat des grands soirs. J'ai mal aux main à force d'applaudir, mais nom de Zeus... quel plaisir !

Et comme il n'est pas de concert sans intégrale et donc bollock's technik, le concert connaîtra un break en raison d'une déficience de casque-retour. Le temps au "plus vieux fan" du groupe de prendre la parole pour arranguer la foule, la priant de prendre conscience de l'instant présent, de son caractère exceptionnel, tant lui, qui a vu les Who à 19 ans dans cette belle et même salle (sourire), qui a connu des grands, etc... et les Cocteau Twins (bien pour Angèle ça, et pas faux du tout) : un grand moment d'initiative individuelle, fortement applaudi (comme quoi, les frenchies peuvent cultiver un non-sens presque Monthy Python, même si je ne suis pas sûr qu'ils le fassent exprès sur ce coup) et encore une fois, j'adhère au propos, et je jubile d'un pouce approbateur hautement levé.

Un rappel viendra, au finish, présenter pour la première fois en live leur nouveau titre ; et même, si là encore, le public ne connaissant pas semble avoir les pieds figés dans la fraîcheur du béton (et oui, "la clim est en option" comme dirait d'un œil amusé et non sans humour le chanteur de Laudanum), j'explose littéralement en me disant que le son s'affirme de plus en plus dans l'efficacité et la pertinence.

Au global, un instant franchement magique, dégagé de toute prétention showbizz, aux accents musicaux certains et réjouissants, pour une des formations à géométrie variable les plus intéressantes du moment, toutes nationalités confondues. Je parie qu'on en reparlera dans quelques année, et je leur souhaite très sincèrement, tout comme j'espère les croiser dans l'intelligence de Sonar à l'occasion. En un mot "merci", merci à eux pour cette vérité sincère et évidente, qui nous prouve qu'en France on est parfaitement capable de connaître des Nectars musicaux de cette trempe.

Longue vie à Ginger Ale, et la plus belle route possible aux mélodies du Laudanum, car hier soir, j'ai enfin croisé à nouveau la route d'une vraie famille du Rock digne de ce nom !

Et, cerise sur le gâteau, tout ceci se terminant, avec plaisir, dans la tiédeur de la nuit, en terrasse sur cours, la Maroquinerie faisant partie de ces rares salles offrant ce type de service en après concert. Où "comment se coucher avec un grumhlbeulll de sourire jusqu'aux oreilles un mercredi soir à l'occasion"...

 Critique écrite le 19 juin 2003 par Rotten


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