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Chronique de Concert

Iggy And The Stooges

Iggy And The Stooges en concert

Zenith, Lille 17 avril 2010

Critique écrite le par

En étant objectif et en prenant un peu de hauteur, il est clair que le zénith de Lille a été Samedi soir le Théâtre d'un très bon concert de Rock. Un groupe légendaire, une salle bien remplie, un son correct, de grandes chansons interprétées par un groupe carré mené par un grand chanteur au charisme évident. Clairement, on ne voit pas cela tous les jours et on ne peut que conseiller vivement à tout le monde de se précipiter pour voir Iggy & The Stooges sur scène.

Cependant le concert de samedi soir n'était malheureusement pas un grand concert d'Iggy et ses Stooges !!!!! En 2007, je voyais Iggy Pop pour la 13 ème et 14 ème fois sur scène depuis 1993, La quatrième et cinquième fois avec les Stooges. Ces deux concerts furent probablement les deux meilleurs que j'ai pu voir de l'iguane (à part peut être le premier car l'effet de surprise était particulièrement intense) ; Iggy était en très grande forme et ressemblait à une créature sauvage emmené par un groupe soudé, rodé et ravageur prêt à en découdre qui vous prenait à la gorge et vous bousculait à coups de riffs brutaux, d'improvisations hypnotiques d'où émergeaient les cris de dément de l'iguane et les solos tortueux du guitariste Ron Asheton. A la fin des concerts on ressortait KO, exsangue mais conscient d'avoir assister à des moments d'exceptions.

En 2007, Les Stooges était au milieu de leur cinquième tournée depuis leur reformation. Une reformation. Complètement inattendue. Iggy Pop avait rappelé auprès de lui les frères Ron et Scott Asheton plus de trente après les fameux albums "The Stooges" et "Fun House".
Ces trente années avait vu l'iguane vaincre ses démons et devenir une star de rock connue et reconnue en tournant aux quatre coins du monde. Les frères Asheton quand à eux vivaient dans le dénuement dans la banlieue de Détroit (Ron Asheton était retourné vivre chez sa mère). Avec la frustration d'être les laissés pour compte de l'histoire de la musique alors qu'ils avaient été la colonne vertébrale d'un groupe ayant commis deux des plus importants albums de l'histoire.





L'histoire s'était mal finie. Ron Asheton avait été délogé de son rôle de Guitariste au profit de James Williamson et s'était retrouvé bassiste pour leur ultime méfait studio, le légendaire Raw Power. L'insuccès, la jeunesse les querelles d'egos, la drogue eurent alors raison des Stooges qui implosèrent et furent déclarés cliniquement morts. Iggy partit se refaire une santé dans un asile pour aliéné. James Williamson posa sa guitare et devint cadre d'une entreprise de la silicone vallée. Les frères Asheton allèrent de déconvenues en déconvenues dans des groupes éphémères et underground de Détroit.

C'est donc comme une revanche sur la vie et une chance inestimable que les frères Asheton acceptèrent la proposition d'Iggy Pop de faire quelques Concerts à l'orée des années 2000 avec les Stooges. Malgré tout ils exigèrent que Williamson ne soit pas convié afin que Ron puisse reprendre la guitare et refusèrent de jouer les morceaux de Raw Power pour ce concentrer sur les deux premiers albums..

Sur scène, le miracle eut lieu. Iggy pop retrouva avec les frères Asheton une alchimie qu'il n'avait jamais réussit à approcher lors des trente années de sa carrière solo. A près de 60 ans, tel le phénix, les Stooges renaquirent de leurs cendres sans que les années ait la moindre prise sur leur musique et leurs prestations scénique.
Iggy semblait être un fauve en pleine force de l'âge. Les riffs de Ron Asheton témoignaient d'une urgence pleine de rancunes à effacer quand son frère Scott martelait ses futs comme un possédé.
Les quelques concerts initialement prévus se multiplièrent et emmenèrent les Stooges dans les plus gros festivals de la planète montrer aux jeunes générations ce qu'était vraiment le rock et qui en étaient les patrons.

Après cinq années de furie sonique, l'histoire prit fin avec la mort subite de Ron Asheton le soir du réveillon 2009. L'histoire était cruelle mais elle avait été belle lors de ces dernières années de renaissance. Orphelins, les Stooges ne pouvaient continuer. L'Iguane reprit sa carrière solo avec l'album de crooner "préliminaires".

C'est à la fin de l'été 2009, le premier été depuis des lustres sans concerts, sans festivals, que le manque se fit sentir. il apparut évident que l'histoire ne pouvait se terminer ainsi. L'Iguane proposa aux deux Stooges survivants l'ultime pirouette, un nouveau défi contre le temps et une nouvelle revanche sur l'histoire.

Il allait proposer à James Williamson, le Stooges banni, de reprendre la guitare et d'interpréter les titres historiques de l'époque Raw Power, ceux la même que Ron Asheton ne souhaitait pas jouer sur scène au grand dam des fans.

James Williamson fraichement retraité de sa fructueuse carrière de cadre californien accepta la proposition et reprit sa guitare qu'il n'avait pas touché depuis l'effondrement des Stooges au début des années 70.

Pour les fans inconditionnels dont je fais partie, cette nouvelle fait l'effet d'une bombe en ces temps de déserts musicaux absolus ou l'on essaie de nous faire passer des vessies pour des lanternes en nous survendant tous les Arctic Monkeys et MGMT de la terre.





Depuis de longues semaines le 17 avril était entouré sur mon agenda. Raw power en concert avec James Williamson, c'est un peu comme le second graal du rock après la première reformation. C'est aussi l'occasion d'espérer entendre d'autres chansons enregistrées par le duo Pop/ Williamson à la même époque. Des chansons comme I got a Right, Kill City, Johana., des chansons pour fans absolus jamais sorties sur album officiels et rarement jouées sur scène. Le concert de Lille allait être le cinquième de cette tournée après une date à RIO fin 2009 et 3 dates françaises dans les 5 jours qui précédaient.
Les échos parus dans la presse les derniers jours étaient plus que bons et les lumières allaient bientôt s'éteindre dans cette salle remplie à bloc.

Tout de suite les Stooges attaquent par "Raw Power" et l'Iguane débarque comme une flèche vêtu d'un gilet qu'il arrachera après trente secondes pour être torse nu comme à son habitude. Très rapidement les titres de raw power vont se succéder entrecoupés de "1970" et "I wanna be your dog" uniques rescapés des deux premiers albums.

Si des chansons comme "Gimme Danger" ou " I need somebody" sonnent bien l'impression qui prédomine est malheureusement que le concert est un ton en dessous de ceux des années précédentes.

Le poids des années semble peser pour la première fois sur la carcasse de l'iguane. Il n'est plus le gladiateur impétueux et instinctif que l'on a connu. Bien sur comme les vieux guerriers, l'expérience et la science de la scène tente de compenser les stigmates d'un homme de 63 ans dont 45 passés à arpenter les scènes du monde entier et qu'une hanche en bouillie fait boiter.

Bien sûr si l'on prend son âge en compte, la performance donnée est exceptionnelle mais il y a encore trois ans on ne l'évoquait même pas. Bien sûr, c'est le quatrième concert de la semaine et la fatigue peut se faire ressentir.

Mais au-delà de la fatigue de l'iguane, la cohésion du groupe n'est pas la même sans Ron Asheton. On ne retrouve pas cette agressivité, cette violence qui transpirait des concerts météoriques des années 2000 ou les titres s'enchainaient sans laisser au public le temps de reprendre son souffle.On ne retrouve pas ces versions qui s'étiraient ou la fusion entre Iggy et son guitariste emmenait le public au-delà du rationnel.

Bien sûr, on est en début de tournée, et les automatismes sont encore en construction, mais James Williamson malgré un style bien à lui et plus qu'intéressant ne semble pas avoir trouvé ses marques.
Si les ballades sont excellentes, on a l'impression qu'il lui manque la rage de Ron Asheton pour transformer les morceaux rapides en rouleaux compresseurs. Et c'est ce qu'on attend de "Raw Power et de Search and Destroy". Il est vrai que Williamson n'a pas ruminé sa rage et sa rancœur pendant 30 ans comme Asheton et qu'il vivait une vie qui l'a mis à l'abri du besoin. C'est sans doute cette rage qu'il lui manque aujourd'hui.

Du coup le batteur et le bassiste semble moins concernés, la complicité entre l'iguane et son guitariste semble quasi inexistante et l'ensemble s'en ressent. On sent qu'il y a la place pour que cela décolle mais que le risque de s'envoler musicalement n'est pas pris. Bref il manque un truc.

Mais ne nous emballons pas, le concert n'était pas mauvais. Loin de là, il était même très bon, mais il n'était pas exceptionnel.

Bien sur il fallait y être car nous avons eu droit à ces fameuses chansons rarement jouées comme I Got a right, Johanna, Cock in my pocket et pour le fans c'est une bonne nouvelle.

Mais il fallait surtout y être car ils ont joué "Open Up and bleed".
Cette ballade crépusculaire est un morceau mythique que l'on ne trouve sur aucun album. On trouve sa trace sur des Bootlegs quasi inaudibles d'où seuls ressortent quelques passages fascinant de ce morceau qui aurait sans nul doute été le chef d'œuvre de l'album qui aurait suivi Raw Power et qui n'a malheureusement jamais vu le jour.
Un album ou l'on aurait retrouvé des titres comme "I got a right", " I am sick of you", "Johanna". Un album qui aurait été le quatrième chef d'œuvre du groupe.

Tout cela ne nous empêchera pas d'être présent le 7 juillet prochain à l'Olympia. Ce soir là, Iggy aura pu se reposer deux jours avant, le groupe aura enchainé les concerts et sera probablement plus rodé.

On verra ce soir là si les jours du Rock sont comptés ou non. Car une chose est claire, les Stooges sont le Rock, l'iguane en est le dernier prophète .

Les Rock Stars sont désormais de vieux messieurs ou se sont boboisés.
Quand ils ne sont pas morts comme Morisson, ils semblent avoir décrochés comme Jagger ou Bowie. D'autre comme Lou Reed sont prisonniers de leur ego et deviennent séniles. Bono ne pense qu'à faire de l'humanitaire quand les plus jeunes ne nourrissent d'autres ambitions d'être invité aux soirées de clôture de la fashion week..

Si Internet a sa part de responsabilité sur la non émergence de nouvelles Rock Stars, le véritable problème est que la musique ne fascine plus, n'inquiète plus. Le côté animal et dangereux s'est fait bouffé par le politiquement correct. Le Rock est un désert depuis Nirvana et Rage Against the machine. Le Rock se vit et n'est pas une musique d'ambiance pour passer une soirée sympa entre bons amis.

Iggy et ses Stooges tentent de nous le rappeler mais on sait depuis ce concert de Lille qu'ils ne seront pas éternels

Que restera-t-il après ?


A lire également, la chroniques du concert d'Iggy & The Stooges au Printemps de Bourges 2010...

Photos d'archives prise par Paolo Proserpio.


Liens : www.myspace.com/iggyandthestooges, www.iggyandthestoogesmusic.com.

 Critique écrite le 21 avril 2010 par lol


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