Accueil Chronique de concert MeShell N'Degeocello
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Chronique de Concert

MeShell N'Degeocello

MeShell N'Degeocello en concert

Espace Julien, Marseille 15 avril 2016

Critique écrite le par

Solitude Standing !
(Intro/Boulot/Dodo)

Installé sur le devant de la scène, casque vissé sur tête et mains affairées passant sans cesse d'un clavier à Pomme à une table, d'un potard à une touche, d'un morceau lénifiant à son suivant, "il" tente de nous faire croire à l'impossible : que nous sommes les invités en représentation, sapés et VIP, d'une soirée "in" localisée aux abords d'une piscine creusée sous pinède avec vue sur le golfe au plus près de Riviera.


Lors, il semble être l'unique spécimen humain à le penser, tenter de le vivre ou bien le rêver, juste ; à paraître intéressé par ce qu'il joue, non, pardon, mixe, mollement : comme une erreur de casting un peu longuette, qui s'étire et s'étiole. Partout devant, autour et sur les côtés, la gent d'ici taille le bout de gras, échange, analyse, se répand, habille le temps qui passe (en mode vitesse lente) tente de tuer l'attente en espérant que la dame d'un soir ne tarde pas trop à nous rejoindre accompagnée de VRAIS HUMAINS MUSICIENS, putain...
Fort heureusement, tout à une fin - bonnes ou mauvaises choses, heures de math ou de plaisir, champagne frappé ou huile de ricin (ou foie de morue) - Notre DJ de première partie finira par plier fissa potards et câbles, sous nos... tout aussi mous applaudissements, il va de soi.


Intermède (court et explicatif)
Avant toute chose, comment ne pas remarquer que la jauge se situe en dessous de la ligne de flottaison, que la salle est montée en conformité réduite. Dommage, dommage, sachant que l'artiste du soir fût autrefois vantée par sa Majesté Pourpre de Minneapolis, Madonna, Chaka Khan, The Rolling Stones, Zap Mama, The Blind Boys Of Alabama, Alanis Morissette, ou bien a également participé à de nombreuses BO de films, documentaires musicaux (Standing In The Shadows Of Motown) et divers hommages ou rétrospectives. Une GRANDE, quoi, en somme. Pas grave, comme souvent, les absents auront très certainement eu tort de négliger icelle. Sentiment tendu à confirmer dès la fin du show, bien entendu.
Pour Une Basse Souveraine...


Dès le lever de rideau, le groupe entame le morceau inaugural du bel hommage, dédié à la regrettée Nina Simone, enregistré par Meshell Ndegeocello en l'année 2012 : le magnifique, empreint d'émotion et fanitude, abouti et plus que recommandé, Pour Une Âme Souveraine ! Dès les premières notes de Don't Let Me Be Misunderstood, l'on devine que la soirée s'annonce sous de très beaux auspices ; une interprétation relativement proche de la version "studio", quoique, plus "laid back", éthérée et ronde, tendue à souhait. Après une courte présentation des musiciens, place à un second extrait du disque sus-cité : Real Real : morceau nanti d'une très belle montée en puissance finale qui réjouit et électrise à la fois ; seule ombre au tableau, un certain manque de précision et relief, niveau micro, qui nous empêche de profiter à fond de la portée du message initial.


Comme attendu, sur Grace (Bitter/1999) la basse de la dame est omniprésente et semble mener l'ensemble en mode figure de proue. Sur la suivante - See Line Woman (Pour Une Âme Souveraine, de nouveau !) morceau porté par une scansion soutenue qui fait avancer l'ensemble d'inexorable façon, la rythmique basse/batterie régale et semble demander à nos petites personnes assises sur chaises (Grrrrrr !) de se lever illico pour entrer dans la transe créée sur scène à quelques décimètres de-là (planant et psyché à la fois). L'occasion, enfin offerte à nous autres humains, de pouvoir se laisser aller durant un court instant et mieux échapper à la lourdeur ambiante : aux retours des lointaines noirceurs moyenâgeuses, aux fascisants diktats religieux ou/et économiques, aux errances politiques, meurtres odieux et déni d'humains option paupérisation exponentielle. Un rêve éveillé dégusté en permanence pleine tronche sur planète plus très bleue qui agonise et s'asphyxie du quotidien (ça remet en forme, du coup, vrai ?).


Dommage que le gars aux claviers (Jebin Bruni) nous montre essentiellement ses fesses : en jouant ainsi, dos au public (ou au mieux, de trois-quarts) il nous empêche de voir les belles lignes de ses mains, sur le très poignant Be My Husband, notamment ; centrée sur ses quatre cordes, la native de Berlin se fend également d'une partie de basse à se damner la pulpe, fidèle à sa douce et redoutable habitude musicienne. Après avoir demandé à ce que l'on baisse les lumières, v'là que la Suzanne de l'homme aux graves redoutables et profonds se pointe : une adaptation de Léonard Cohen qui ne cesse de monter et monter, de creuser chaque seconde plus avant au sein du derme poétique, enflammé et fin, du Canadien de légende. Épique.


"C'est un très bel endroit qui vous fait vous sentir mieux, fait chaud au cœur !" : ça fait toujours plaisir à entendre, même si nous savons toutes et tous qu'il nous faudra, à terme, quitter ce lieu vibrant pour s'en aller arpenter les rues adjacentes souillées et (mal)odorantes, bruyantes et (parfois) inamicales, yep. C'est le moment que choisit Chris Bruce pour placer un magnifique Riff sur Fender, suivi d'un solo inventif et vrillé en son centre ; là encore, l'ensemble avance pour notre plus grand plaisir en mode brise-glace, avant que de finir par se lâcher totalement de la bride.


Durant Shopping For Jazz, la partie de basse me rappelle à quel point j'ai pu aimer le duo alors formé de John Mellencamp & Meshell, sur le Wild Night de Van The Man Morrison : un pousse au cul redoutable qui avait plutôt très bien fonctionné et vendu, en la lointaine... 1994 ! (Quand on vendait et achetait encore des disques en masse, si, si !).
Surpris, puis carrément ravi par les réminiscences très "Hendrixiennes" de Forget My Name, et son tempo flirtant parfois avec le Reggae, basse en tête de nouveau, je me désole qu'il n'y ait eu ce soir aucun stand nous permettant d'acheter le dernier et emballant Comet, Come To Me ; avant que le très impressionnant Abraham Rounds ne se lance dans un rythme de batterie compliqué et bluffant, toujours soutenu par sa comparse de section pour un Folie à Deux saccadé et puissant, vivifiant et tonique, léger mais dense, enlevé et musical, Soul & Jazz... Instant d'une redoutable perfection suivi d'une accélération fulgurante qui voit l'ensemble "au taquet", cordes et touches postées en embuscade du duo rythmique (jamais trop loin, ni trop présentes) ; je me demande alors si ce n'est pas dans cette direction qu'aurait obliqué feu Jimi (Hendrix) en son musical temps, s'il n'avait succombé si connement : impression confirmée par une paire de baguettes qui moulinent soudain en mode Machine Gun pour mieux coller aux basques de son acolyte sur six cordes.


Quand on assiste à ce genre de performance rare, avec un quatuor de musiciens qui "taquine", qui s'investit à fond, chacun immergé dans son instrument tout en ne cessant d'épauler l'autre, bien loin des réalités de ce business gluant ou milieu mercantile comptant, trébuchant et puant, l'air est soudain plus pur. À les voir ainsi, uniquement et totalement plongés en leur art, soi-disant mineur - comme quoi le gars Gainsbourg n'aura pas dit que des choses immortelles, censées ou justes, de son vivant - on se remémore soudain pourquoi la MUSIQUE EXISTE, à quoi et comment elle sert, aide, révèle, ouvre, cicatrise ou apaise ; quand on pense que certains rétrogrades bas du turban la condamnent avec véhémence de nos jours et chercheraient tout bonnement à l'éradiquer prochainement du quotidien de notre humanité sous de laides "prophétiques" paroles restant encore à prouver, authentifier ou démontrer (démonter ?) ça fait frémir du "dedans", déprimer, déplorer et s'insurger. Ouaip.


Coupable, je suis, d'avoir passé la quasi totalité du morceau suivant à regarder ses doigts courir sur le manche, tandis qu'"elle" semblait, yeux mi-clos, s'"autoemplir" de ses propres notes, tirées et rondes ; mais, bon, ben, c'était juste beau... quoi !
Son final sur Friends ne fera guère qu'authentifier un peu plus à quel point ce moment de "partage" aura comblé, rempli et captivé, révélé, ouvert, cicatrisé et apaisé :
"Certains sont "ok" et vous traitent de façon vraiment cool/D'autres confondent gentillesse et naïveté/Nous aimons en côtoyer certains parce qu'ils sont drôles/D'autres ne viennent que lorsqu'ils ont besoin de fric/D'autres ont juste grandi et avancé avec-vous/Et vous vous sentez toujours proche d'eux, jour après jour/Vous souhaiteriez n'avoir jamais connu certains d'entre eux/ Combien d'entre nous en possèdent vraiment/Des amis/Ceux sur lesquels nous pouvons compter/Des amis/Ceux sur lesquels nous pouvons compter/Avant d'aller plus loin/Soyons amis..."

LE concert de l'intérieur du moi(s) assurément...

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