Chronique de Concert
Babel Med : Moussu T e Lei Jovents + Zoufris Maracas + Simangavole + Boom Pam + Saïko Nata + Joel Sebunjo + Baja Frequencia ...
Cette année je m'étais résigné à faire l'impasse sur Babel Med ce salon pro devenu un festival avec une vrai identité sinon en tout cas thématique et où les gens viennent avec plus de curiosité qu'à la Fiesta par exemple où ils sont attiré par un artiste connu qu'ils viennent voir. En tout cas c'est l'impression que j'en ai. Bref je comptais ne pas aller à un concert ce soir pour plutôt voir des potes, mais ils se trouvent que ces derniers avaient justement envie (après le choc Toulon Toulouse au Stade) d'aller à Babel Med. Du coup nous y voici. Je commencerai en mode chroniqueur pour Liveinmarseille / Concertandco et glisserai progressivement en mode concert entre potes ce qui expliquera mon manque d'assiduité sur certaines scène.
Nous sautons du tramway un peu après le début officiel des hostilités, passons vite devant la camionnette du Walkabout Sound System que Tony S a momentanément déserté pour nous rendre à la scène sous chapiteau où les Simangavole n'ont pas fini leur set. Tant mieux ! Groupe de la Réunion, quintet exclusivement féminin, ils font du (ou de la) mayola, musique traditionnelle de l'île qui par moment me fait un peu penser à la musique brésilienne.
Du chant, des percus, quelques cordes et surtout de la danse. Toutes équipées de micro casques elles me donnent tort moi qui soutient que l'une des preuves que toutes les chanteuses danseuses connues (Rihanna, Beyonce, Madonna, ...) font du play back est qu'il est impossible de danser à fond ET chanter. C'est pourtant ce que les 5 Simangavole sont en train de faire juste sous mes yeux. Entre les morceaux elles nous expliquent leur musique (parfois comme si elles s'adressaient à une classe de collégien), mais je dois reconnaitre que j'apprends des choses sur cette culture que je connais mal.
Nous filons ensuite au cabaret où du fond de la salle nous apercevons notamment un jeune virtuose de la kora. Il s'agit de Joel Sebunjo et de ses 3 musiciens qui viennent d'Ouganda. Je fais le tour pour m'approcher du devant de la scène et suis surpris de voir que les premiers rangs sont en configuration assise. Du coup malgré toute l'énergie qu'ils mettent sur scène ils n'arriveront qu'à tirer de larges sourires et applaudissement fournis du public assis.
Guitare électrique, basse, batterie et kora produisent un mélange bien entrainant qui portent les textes en VO ou en anglais du chanteur. Au moment où celui-ci troquera sa kora pour une sorte de harpe / lyre appelée endongo, pour des morceaux plus posés nous nous éloignerons direction la salle des sucres pour un franco-sénégalais du nom de Saïko Nata. Si j'avais lu la description avant de venir je n'aurais pas été aussi surpris car en effet il s'agissait bien de "Fusion délicate entre 2 continents musicaux, Saiko Nata entrelace avec finesse un piano classique, les notes tressées d'une kora, une contrebasse et des percussions africaines qui conversent dans une douce alchimie."
Sur scène une pianiste classique, Agathe Di Piro, habillée comme telle, un joueur de kora, Kandia Kouyaté (ndP en fait il s'agisait de Ousmane Kouyaté en remplacement de dernière minute), et un percussionniste, Fallou N'Diaye et un contrebassiste en la personne de Matthieu Tomi (déjà croisé dans des projets aussi variés que Watcha Clan ou le Hatman Session). Après l'énergie de Joel Sebunjo on passe à une ambiance plus posée. Alors que je suis en train de me dire qu'ils auraient pu se rapprocher un peu les uns des autres plutôt que de s'installer en fond de scène un danseur en collants noirs fait son entrée, rejoint par une danseuse dans une grande chemise blanche qui viendra s'allonger sur lui.
Je ne serai pas très sensible à leur façon de danser et j'avoue que lorsque je me retournerai vers la scène après m'être éloigné pendant leur version de Carmen la vision du danseur en train de remuer des fesses dans un marcel géant et au loin la danseuse dans ce qui ressemblait à une chemise hawaiienne trop grande (mais devait plutôt être un peignoir asiatique) confirmera l'impression un peu foutraque que j'avais depuis l'entrée sur scène des danseurs. Me disant que le format court / zapping de la soirée n'était surement pas la meilleur façon de découvrir un spectacle aussi multiple ...
... je partirai vers le chapiteau pour écouter les Boom Pam, groupe israélien qui était interviewé par le plateau mobile de Grenouille un peu plus tôt dans la soirée. Il faudra patienter un peu que certains sortent pour rentrer dessous. Ambiance plutôt ska rock avec à la tête du groupe un guitariste qui me faisait penser à David-Ivar Herman Düne qui aurait piqué le chapeau d'un des 3 brigands de Tomi Ungerer.
Autour de lui un joueur de tuba avec une cape noir, une claviériste discrète habillée en rouge, derrière un batteur aux petits airs de Eugene Hutz de Gogol Bordello et sur pas mal des morceaux d'une danseuse courtement vêtue. Globalement très instrumental j'ai pensé à plein de choses très différentes : Kabbalah pour le mélange mélodies / rythmes traditionnels revisités et le chant quand ce n'était pas des onomatopées, aux Messer Chups pour les parties limite surf rock, mais aussi à la musique du Grand Blond avec une Chaussure Noir ... Certains parties plus métal avec le tuba bien en avant feront bondir le public du chapiteau visiblement ravi de ce mélange !
Ayant retrouvé Aude et Antoine nous discuterons un moment et nous rendrons ensuite directement dans la salle des sucres, ratant le set fado de Gisela João au Cabaret. Sur la grande scène les Zoufris Maracas visiblement rodés occupaient bien l'espace. Et si je me suis quand même demandé la raison de la présence d'un groupe que j'avais étiqueté "chanson française" au festival je me suis dit que ça devait être à cause de leur musique métissée qui puise un peu sur tous les continents. En tout cas je me souviens que j'avais déjà été surpris de leur présence aux Nuits Zébrées il y a quelques années.
Un peu la même impression qu'à l'époque, j'aime beaucoup leur énergie (à l'image de leur batteur frénetique), musiques et la plupart des textes mais ils ont ce côté "engagé" où la frontière entre le démago / irritant et le partage de convictions communes est tellement fine qu'elle est souvent franchie. En claire j'ai pensé à Sinsemilia, Zebda, aux Cowboys Fringants ... et bien sûr aux Hurlements d'Léo pour la trompette qui fait des merveilles.
Après une chanson dans le noir et une intitulée Nanotechnologies où beaucoup de choses sont mélangées je suivrai la fin de leur set de plus loin et c'est donc du fond que les verrai inviter sur scène un monsieur (de 82 ans) et une petite fille (de 7 ans) qui improviseront une chorégraphie pendant leur tube Un gamin ... festif à souhait ! On sent bien qu'ils auraient bien aimé continuer au-delà du temps imparti. En guise de rappel le chanteur se lancera dans un petit a capella gentiment provocateur. Après notre soif nous fera rater Majid Bekkas(Maroc) au cabaret et Loriane Zacharie (Martinique) sous chapiteau ...
Nous reviendrons donc dans la salle des sucres pour retrouver Moussu T e Lei Jovents que je n'avais pas vu depuis 10 ans ! (à une époque où les Jovents n'étaient que 2). Par contre ayant beaucoup écouté leur dernier disque Operette et ayant récemment vu Blu et Tatou à la Meson j'étais quand même bien familier avec le répertoire de ce soir. Les 4 musiciens banjo, batterie, contrebasse, et percus arriveront en premiers tous habillés d'un rayé et d'un bleu de de chantier naval et attaqueront par dans ma petite calanque jusqu'à l'arrivé de Tatou (habillé pareil) une bière à la main.
Les 45 minutes de leur set (la même durée pour tous) pendant lesquels ils joueront Vous avez l'éclat d'une rose (pour lequel Tatou visera quelqu'une au premier rang), j'aime la mer comme une femme, le plus connu Adieu Venise provençale, Miette ou encore Voli anar monte vas (seul morceau en occitan). Les textes des chansons (je rappelle qu'il s'agit exclusivement de reprises des années 30-40) n'ont pas pris une ride ce que se plaira à souligner Tatou, faisant des parallèles avec l'actualité (notamment le deuxième tour des élections du lendemain).
Blu fait toujours des merveilles au banjo, et avec les 3 autres c'est vrai que le son grossit et fait encore plus danser. Danser mais en douceur car la musique de Moussu T et Lei Jovents s'écoute totu aussi bien assis (comme eux). Entre (et même pendant) les morceaux se sera traquage (avec l'accent) et galéjade ... comme ces scènes familières qui se jouent les soirs d'été à la terrasse de certains café. On a l'impression de les connaitre depuis toujours et de faire partie de la famille. Vivement l'été !
Après cette parenthèse douce et ensoleillée j'irai faire un tour au Cabaret pour voir le dernier live de la soirée, celui de Baja Frequencia à savoir Goodjiu et Azuleski tous deux membres du Massilia Hi-Fi qui sévit régulièrement au Molotov. Ce soir l'un était au portable et l'autre jouer des percus sur 2 louches, une écumoire, une théière et une boule à facette connectés. Amusant mais plus gadget que musical au final.
En tout cas leur mélange de (je cite) "Nueva Cumbia, Dub Digital, Moombahton et de Tropical Bass" a fait danser le cabaret jusqu'à tard. Pour nous il était grand temps de choper le tramway exceptionnellement ouvert jusqu ‘à 4h (changement d'heure intégré dans le compte). En repartant nous passerons à nouveau devant le camion de Tony S qui avait retrouvé ses platines, pour la grande joie de ceux qui préféraient danser dehors !
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Critique écrite le 31 mars 2015 par Pirlouiiiit
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