Accueil Chronique de concert Ballet Preljocaj dans "Noces" et "Sacre du Printemps"
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Chronique de Concert

Ballet Preljocaj dans "Noces" et "Sacre du Printemps"

Pavillon noir - Aix en Provence 1er juillet 2011

Critique écrite le par

Le lendemain des Eagles au stade Louis II de Monaco et quelques jours avant Journey/Foreigner à Paris, autre lieu, autre ambiance avec le Ballet d'Angelin Preljocaj au Pavillon Noir d'Aix en Provence !
Pour le coup, c'est une vraie première pour ma part, d'aller voir un ballet ! Mon expérience en la matière se limite au film "Black Swan" et à quelques reportages tv, sans oublier le "Fantasia" de Disney dans ma jeunesse, c'est dire mon inculture dans le domaine !

Comme chacun sait, je déteste l'Opéra en général, et la danse classique m'ennuie très vite. C'est comme pour tout Art, certains sont touchés, d'autres totalement indifférents, voir hermétiques. Pourtant j'aime voir des chorégraphies "modernes", j'ai déjà assisté à des spectacles de djeun's pratiquant de la danse plutôt hip-hop ou très rythmée que l'on peut voir dans des films par exemple, mais le monde du ballet est à cent mille lieux de mon univers, de ma musique. J'en ai une image surannée et chiante.

Mais restant curieux de nature pour tout ce qui concerne les Arts, je profitais des invitations envoyées à ma moitié par la costumière du Ballet Preljocaj, en remerciement du bon boulot relatif aux chaussons des danseurs qu'elle peut lui faire tout au long de l'année, pour avoir un aperçu de cet univers assez discret, et, disons le sans détours, élitiste dans mon esprit. Le fait que la danse soit contemporaine (je crois que c'est le mot), et non pas classique, me rassérénait quelque peu.

Nous nous pointons donc au Pavillon Noir d'Aix en Provence en ce premier soir de vacances scolaires, qui est un petit bâtiment jouxtant la Cité du Livre. Au bout d'un patio nous rentrons dans la salle comportant une vingtaine de gradins bien dénivelés, histoire que d'où que l'on se trouve, nous ayons une belle vue sur les planches. Placés un peu en haut et en plein centre, je trouve notre situation idéale. Merci à Mademoiselle Duranti pour la peine.

Le spectacle de ce soir se compose de deux parties distinctes, mais toutes deux sur une musique d'Igor Stravinsky, et sur une chorégraphie d'Angelin Preljocaj, qui, au vu de sa courte biographie imprimée sur la feuille du programme, n'est pas un débutant, loin de là ! Je dirai même que c'est une pointure le gars, au vu de son cv ! 46 pièces chorégraphiées, des associations avec Bilal, Air, J.P Gaultier, Laurent Garnier, Vejvoda... des courts métrages, des collaborations cinématographiques et même des bouquins écrits sur lui et son travail ! Une pointure quoi !

A partir de maintenant, je m'excuse par avance vis à vis des aficionados et autres spécialistes qui pourraient être amenés à lire ce compte-rendu amateur, car je ne vais pas usiter de termes ni écrire de paragraphes ampoulés et empli de sens profond en métaphore filée de ce que peut signifier tel enchainement ou tel mouvement suggérant les élans primitifs explorés par Angelin à travers sa chorégraphie... En effet, comme pour la mode ou l'opéra, je trouve que les discours, résumés, critiques ou descriptions sont souvent pompeux, gargarisant, snobinards et incompréhensibles pour la majorité de la population, d'où la taxation d'élitiste que j'écrivais plus haut.
Pas que je ne vois pas d'interprétations possibles à la danse, loin de moi cette vision réductrice, mais clarifier le propos amènerait plus de gens à s'y intéresser je pense.

Il est temps d'ouvrir le rideau pour "Noces", réunissant 10 danseurs, 5 bancs, et 5 poupées de chiffon grandeur nature, sans visages et en tenue de mariée. Ça commence doucement, pour ensuite alterner, au gré de la musique, les passages endiablés et les parties plus posées.
Ce qui frappe tout d'abord, c'est la forme physique qu'il faut posséder pour produire 35 minutes durant, tant d'énergie individuelle et collective ! Les cinq filles sont éblouissantes dans leurs petites robes volantes, virevoltant sans cesse. Les garçons sont gracieux et au diapason de leurs collègues féminines, qu'évidemment j'ai plus tendance à suivre que leurs homologues masculins.
Car la troupe remplit tout l'espace, et il est difficile de suivre tous les danseurs en même temps.
Je picore donc par ci par là, n'arrivant pas à avoir un plan d'ensemble quand les mouvements sont différents selon les couples formés ou selon l'emplacement sur les planches.

Ce que j'ai adoré lors de cet acte, c'est l'interaction des protagonistes avec les objets. Notamment avec les bancs, car on aurait souvent dit qu'ils ne faisaient qu'un avec le danseur, que c'en était le prolongement logique, que le geste en découlait naturellement. Je ne vois pas comment retranscrire par écrit cette profusion d'enchainements, mais ce qui est sûr c'est que c'était plaisant, et que je n'ai pas vu le temps passer.
Il y avait un juste équilibre entre la violence exprimée par les corps à travers tout un panel d'étirements, de projetés, de courses, d'empoignades, et la grâce sauvage des artistes, collant au plus près de la musique pour en ressortir de vraies noces barbares. A l'image de ces poupées malmenées, jetées, battues, contrastant avec la beauté dégagée par les danseuses ardemment désirées par les danseurs. Vraiment un bon équilibre de suggestion, pas vulgaire, pas gnagnan.
Si je fais abstraction de la musique (enfin surtout du chant, qui m'horripile), c'est une très bonne entrée en matière pour mes débuts au Ballet.

Après un entracte d'une vingtaine de minutes, ce sont cette fois 12 membres qui vont nous interpréter "Le sacre du Printemps", œuvre apparemment scandaleuse à son époque du début du siècle dernier. Et en effet, si c'était interprété comme cela il y a 100 ans, je comprend le choc ! Moi même ayant été "choqué" (pourtant hein...) pendant la dernière partie de ce sacre....
Autant les "Noces" étaient sexuellement très bien suggérées, autant ici c'est ouvertement violent, touchant au viol, à la soumission, à la folie. Six carrés d'herbe, qui seront souvent bougés, malmenés, serviront de lieux de débauche, de lutte, de rempart. Pour être au final rassemblés en un terrain où l'élue sera mise totalement à nue, exécutant jusqu'au dernier accord une danse limite obscène, en tous cas furieuse.
La performance de cette danseuse asiatique est en soi incroyable, car se faire violenter dans l'enlèvement de ses oripeaux pour danser nue un long moment devant tant de gens me parait terrible. Mais ce qui m'a choqué, et je ne sais pas si c'était un choix délibéré, c'est sa maigreur... Une vraie maigreur dérangeante à mes yeux, sans aucunes formes, cotes saillantes, livide. Je me sentais comme un voyeur malsain, je ne me suis pas senti bien moralement et visuellement.

Pour le reste, la chorégraphie était tumultueuse, avec des mouvements s'apparentant à des danses nuptiales sauvages, avec de très explicites mimes de fornications forcenées, des enchainements rapides et, je pense, durs à exécuter techniquement.

Après une grande ovation collégiale des danseurs ayant tout donné, je pensais qu'ils allaient faire venir le chorégraphes sur scène, mais non, le rideau se ferme et au revoir. Dommage, j'aurai bien aimé connaitre de visu cet Angelin qui possède un talent indéniable pour distiller des chorégraphies diverses et assez intéressantes pour faire passer un bon moment à un pur néophyte comme moi.

Je n'irai pas voir un tel show tous les jours, mais de temps en temps pourquoi pas, c'est culturellement enrichissant.

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