Chronique de Concert
The Lords of Altamont + Mystic Motorcycle
Mon dieu ce qu'il ne faut pas faire par amour du rock ! Par exemple se rendre pour la troisième fois en 5 jours au Poste à Galène (note pour plus tard - chercher un appart' rue Ferrari), juste pour être sûr de ne pas rater une éventuelle légende naissante. En première partie, les toulonnais de Mystic Motorcycle : casquettes en cuir, fringues infectes, zèbre et soie, façon Marcel et son Orchestre, maquillés comme des camions volés : une certaine idée de l'élégance, on s'approche des New York Dolls mais est pas loin non plus des Guns n'Roses, surtout avec cet infâme éclairage qui restera tout le concert (en gros des flots de bière , puis d'encre, puis d'huile, qui défilent de gauche à droite) .... Ils développent un gros son rock qui reste assez propre car leurs rythmiques sont parfaitement carrées, malgré leurs airs de branleurs irrécupérables.
Cela dit le son n'est pas fabuleusement réglé, on entend quand même principalement la batterie et les cordes aïgues, et les miaulements du chanteur. Cela étant une chanson assez longue où ils demandent à tout le monde Are You Gay ? me mettra particulièrement en joie, avec un solo de batterie épileptique et un final pétaradant. Dans les meilleurs moments on pense aux Ramones et ça c'est évidemment un compliment ! De même cette reprise très punk de la célèbre chanson dont j'ignore le titre et l'auteur (ouh, le naze) et qui fait Ouh, eh, ah ah ! au refrain (NdPh, 2007 : She Said, d'Hasil Adkins, succès ensuite des Cramps). Ou encore une tentative de slow d'environ 30 secondes qui dérape dans le pogo le plus basique. Première partie assez pimpante donc même si les Mystic Motorcycle quittent la scène dans l'indifférence à peu près générale, sans doute parce que leur set a duré 10 minutes de trop ?
...Une interlude Stoogesienne hautement appropriée me permettra de comparer avec une collègue, outre nos impressions de son concert aux voix du Gaou, nos connaissances respectives en matière de Lords of Altamont, dans l'ensemble assez faibles (aucun de nous n'a jamais entendu le premier album). On conviendra ensemble que sur leur 2ème, Lord have Mercy, ça donne du rock garage qui pousse bien au cul quoique très -trop- influencé, un album correct sur lequel il manque quand même au moins une chanson définitive, genre qu'on ait instantanément envie de réécouter et qui leur donne un son bien à eux.
Petite déception quand ils arrivent ; d'après ce que j'en avais lu, je m'attendais à un look plus biker (moustache, cheveux, bide à bière) et non : fringués en noir sans excès, dégaine de jeunes poseurs et rock stars en devenir - rien à voir avec le style Supersuckers que j'espérais. Pas non plus le côté un peu kitsch du poète-maudit-chevelu-en-cuir style B.R.M.C.. Ben non, faut bien l'avouer : grand et affuté, bras tatoués et d'énormes lunettes de soleil disons-le, le chanteur/joueur d'orgue farfisa Jack 'Preacher' Cavalier aurait même carrément la classe.
Autre point, mais ça se voyait déjà sur l'affiche : il y a deux guitares soit vraisemblablement une de trop. Et en effet elles joueront souvent la même chose. Mais du coup le volume général est par moments limite pénible (il faut bien que chacun s'entende). Pour moi désolé mais quand on fait du rock garage, avoir deux guitares à plein temps c'est comme porter des bretelles et une ceinture - c'est qu'on est pas tranquille !
Bref le groupe envoie du très gros volume sonore, qui noie un tant soit peu en live les nuances éventuellement psychobilly, stoner et autres qu'on percevait sur album : G-A-R-A-G-E, point barre. En fait une image me revient en permanence : si on enlève le son d'orgue, on dirait les Stooges jouant à la Maison Hantée sans avoir fait la balance... Notamment dans la façon qu'à le chanteur de s'exprimer, plus proche des aboiements de James Osterberg que du chant de Rob Tyner du MC 5 dont se revendique pourtant le groupe ... Mais enfin il y a des comparaisons moins flatteuses : sa voix est puissante et hargneuse, que demande le peuple ...
Je n'ai pas à mon actif assez d'écoutes de l'album pour reconnaître toutes les chansons, alors voici ce que j'ai identifié : un début avec la très chouette Cyclone qui ouvre l'album, et où les futs sont d'entrée brutalisés au delà du raisonnable. Puis une du premier album qui doit s'appeler Fuck you up (c'est ce qu'il a crié au refrain). Time et ses borborygmes très Stooges. Par moments c'est un autre chanteur qui prend le relais, un peu moins puissant mais peut-être plus chanteur justement. Je pense qu'ils ont bien dû faire Live Fast ou Velvet sans forcément les avoir reconnues, ainsi qu'une tentative avortée de slow comme leurs prédécesseurs. Par contre j'ai bien reconnue l'assez terrifiante She cried, sans doute l'une des plus représentatives du groupe.
Pour un soir de St Valentin, quoi de tel qu'une longue digression sur les "pussies" (littéralement les minous) quand on est américain et poète ? ca tombe bien, une jeune starfucker a très envie de parler du sien au chanteur. Un peu fatiguante, elle finit par retourner à l'anonymat après une vanne bien sentie de celui-ci. Il est vrai qu'une créature blonde autrement plus affolante (peut-être déjà sa copine) s'étant déjà agrippée à son pantalon quand il était debout sur son Farfisa, il peut se permettre de faire le difficile !
A un moment je me suis dit que ca pourrait aussi ressembler aux Rolling Stones sous l'emprise d'un commando terroriste qui aurait poussé tous les potards à 11, même si l'image des Stooges revenait avec insistance (le son était proche de Metallic KO). ce qui m'a valu de ma voisine une réflexion que je vous livre : t'es fou, c'est vachement plus 60's que les Stooges! Un voisin inconnu a ajouté : C'est vachement bien, justement parce qu'il sait pas chanter !... et un autre collègue moins mystérieux leur a simplement prêté un côté basique et énervé comme il aime et, en effet (et lui au moins j'ai compris ce qu'il voulait dire...).
En conclusion du concert, le groupe rejoue Cyclone dans une version longue, tonitruante, enthousiasmante : à la réflexion c'est peut-être bien ça, leur meilleure chanson ! Ils disparaissent sans forcer leur talent après une heure de concert, ça tombe bien, j'en avais presque marre (je vais encore me faire des amis).
Alors au final et pour mettre tout le monde d'accord : un groupe probablement sans génie mais croyant sincèrement dans ce qu'il fait, une bonne présence scénique et un efficace ramonage de cages à miel : quelqu'un dans la salle avait-il réellement quelque chose de mieux à faire un mardi soir que de célébrer un certaine idée du rock immortel avec les Lords of Altamont ??
Moi, non.
Photos Pirlouiiiit arrivé trop tard pour voir les Mystic Motorcycle, désolé
Critique écrite le 15 février 2006 par Philippe
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