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Interview de Gomm

Orange Bleue, Vitry-le-François Juin 2007

Interview réalisée le 12 juin 2007 par Bertrand Lasseguette

Voici une interview du groupe Gomm recueillie avant leur concert du 6 avril dernier à Vitry-le-François (Marne). Je les connais un peu. Marie, la chanteuse, est la sœur de Thomas, un très bon ami. Voilà pour l'anecdote qui n'intéresse personne d'autre que moi. Gomm est un excellent groupe. J'ai eu le coup de foudre en les découvrant en première partie de Blonde Redhead, le 26 mai 2004, à la Cigale. Je n'avais jamais vraiment eu l'occasion de les écouter et là en une demi-heure, je me suis retrouvé embarqué, fasciné, séduit par ce groupe qui mêle sobriété et hystérie et d'autres choses comme le français et l'anglais, Black Sabbath et Blondie, Sonic Youth et Can. Des groupes qu'ils ne font pas que citer, Gomm les égale, voire les dépasse.
Pour l'heure, nous nous trouvons dans le hall de leur hôtel du soir, le bien nommé Hôtel Tambourin situé en face de l'Orange Bleue. Leur deuxième album est sorti au début de l'année et il se prépare là à jouer leur 18 ème concert de l'année, l'occasion de tirer un premier bilan. Bilan en demi-teinte quant à l'avenir du monde des concerts.





Q : Comment se passe la tournée ?

Mathieu (guitares) : Ca se passe très bien sauf quand on joue avec Nadj.

Marie (claviers, chant) : Ca s'est très bien passé au niveau des concerts, de la réaction du public, les gens sont super contents, les programmateurs aussi. On a eu des propositions. Au niveau artistique ça se passe très, très bien, mais... ( elle hésite à poursuivre)

Olivier (batterie, chant) : ...Apparemment, ce serait une mauvaise période au niveau de l'affluence aux concerts. En tout cas, c'est le discours que nous tiennent les programmateurs. Ils ont du mal à faire venir des gens dans les salles.

Marie : C'est vrai qu'il y a des endroits où il n'y avait qu'une quarantaine de personnes. Au départ, on pensait que c'était nous, parce que nous n'étions pas assez diffusés à la radio et à la télé, que ça tenait à Gomm. Et puis en fait, visiblement, c'est une situation qui est de plus en plus prégnante dans tous les lieux. Tous les programmateurs se plaignent qu'en ce moment c'est très dur pour eux. Pour nous, aussi bien que pour des groupes plus médiatisés, comme Herman Düne, ou Abd el Malik. Ils ont des problèmes pour remplir les salles. C'est moins le cas dans les grandes villes étudiantes comme Nantes, Rennes, Lyon, mais dans tous les lieux plus isolés, ils ont énormément de mal.
Personnellement nous sommes très contents des retours qu'on a sur notre musique, mais d'un autre côté c'est un peu plombé par tous ces commentaires et les situations dont on nous fait part. De la part des mecs qui gèrent les salles, des associations, des groupes même avec qui nous tournons pour qui ce n'est pas facile. Nous avons la chance de faire pas mal de dates et dans des conditions optimales parce que nous sommes toujours payés. Mais on se rend compte que ce n'est pas le cas de beaucoup de groupes.
C'est un bilan sombre qu'on tire.
Le disque, on n'arrête pas d'entendre dire que c'est la crise. Et... oui, on se rend compte qu'effectivement c'est la crise.

Olivier : Ce n'est pas aussi fun qu'il y a quelques années. On sent que quelque part il y a un problème. On ne sait pas d'où ça vient. Les programmateurs s'excusent presque qu'il n'y ait pas plus de monde pour ton concert. A Blois nous avons joué devant quarante personnes. On s'est vraiment bien amusé. C'est l'un des meilleurs concerts qu'on ait fait. Mais c'est vrai que dans un premier temps, avec si peu de monde, tu peux te poser des questions, mais après quand tu sais que quinze jours après toi, il y a Herman Düne qui passe et qu'ils n'ont fait que cinq préventes. Tu te dis bon ben voilà, c'est pas nous.

Marie : C'est relativement inquiétant pour le monde de la musique et des concerts. On en a vraiment discuté. A chaque fois qu'on croise des acteurs du milieu tu sentais qu'ils avaient besoin de vider leur sac, qu'ils cherchaient une oreille à qui se confier. Le débat est intéressant. D'où ça vient ? Est-ce une question de génération ? Est-ce que les gens préfèrent boire des coups dans les cafés ? Est-ce que les gens recherchent plus ce fun là que les concerts ?
J'ai l'impression que ce qu'on a rencontré dans le monde du cinéma, puis dans le milieu des bouquins, ça arrive maintenant dans le monde du rock. Ce n'est pas un monde qui va être épargné.

Mathieu : On dirait que les gens sont beaucoup moins curieux qu'avant. Quand ils sortent, tu as l'impression qu'ils misent sur une valeur sûre, ils donnent leur fric à un gros groupe, un gros spectacle comme Matmatah ou Olivia Ruiz. Ils ne vont pas chercher la découverte.

Olivier : On les abreuve tellement. Il y a une surenchère. Ceux qu'on entend, on les entend beaucoup. Peut-être que ça rend les gens un peu plus endormis.

Marie : Il n'y a jamais eu autant de groupes en mesure de faire parler d'eux, par myspace notamment. On voit d'ailleurs là le double tranchant de myspace. En gros, on a presque l'impression que trop de musique tue la musique. Les programmateurs ne savent plus où chercher et que faire tellement ils ont de demandes...
Voilà... Beaucoup de questions, qui n'ont pas de réponses. Tout le monde essaie de chercher une solution pour trouver une solution, pour sauver les concerts et les disques.

Q : Bon... on va rester un peu sur cette humeur négative. Quel a été votre pire souvenir sur cette tournée ?

Marie : Indépendamment que très souvent, on devenait des déversoirs à plaintes. Un phénomène qui sur la longue brouille ton enthousiasme. Je pense qu'on est d'accord sur Le Havre...

Mathieu : euh, non.

Marie : Le Havre... C'était un concert où il n'y avait pas beaucoup de monde et on avait l'impression que les gens étaient devant leur télé. Il n'y avait pas de réaction. Enfin si...juste à la fin pour demander le rappel. C'est la première fois qu'on ne sentait pas d'interaction avec le public.

Guillaume (guitares): ils étaient trop sages.

Mathieu : Pour moi, c'est le concert du Confort moderne. Là c'est personnel. J'ai cassé une corde. Moi j'attendais ce concert avec impatience LE Confort moderne, un super lieu. Sauf qu'au bout de quarante secondes, j'ai cassé une corde et que j'ai été privé de ma super guitare. Du coup j'ai joué faux quasiment tout le reste du concert. (ils n'ont pas de backliner pour les aider dans ces moments).

Olivier : On a failli le virer du groupe à la fin.



Q : Le meilleur souvenir ?

Guillaume : C'est quasiment dans les mêmes conditions qu'au Havre, devant quarante à cinquante personnes. Au Chatodo, à Blois.

Marie : On n'a pas su expliquer pourquoi, mais la quarantaine de personnes qui était là, s'est tout de suite manifesté, ils ont réagi aux morceaux, c'était assez magique et l'échange s'est prolongé après le concert.

Olivier : On faisait corps avec le public. A chaque moment du morceau, tu lèves les yeux, et qui que soit que tu regardes, démonstratif ou pas, tu sens qu'il est là et que tu es là pour lui. C'était évident, manifeste.

Q : Est-ce que vous suivez une préparation particulière avant de monter sur scène ?

Guillaume : Chacun de notre côté, on prend un moment pour se concentrer. On va quand même faire un concert, ce n'est pas un moment comme les autres. Physiquement aussi, il faut se préparer, échauffer la voix, les muscles,

Mathieu : une petite vodka.

Olivier : Quand j'ai moins de temps, quand je ne peux pas prendre le quart d'heure qu'il faut pour me dire que ça y est je vais faire un concert, ça se ressent ensuite, je suis moins bien.

Q : Vous arrive-t-il d'y aller à reculons ?

Marie : Globalement on est toujours super content de jouer. Mais si le programmateur nous dit, ce soir, on n'a que trois préventes, c'est sûr que c'est un peu dur. On a un passage de déception puis on reprend du poil de la bête.

Olivier : A partir du moment où on a commencé le concert, on trouve toujours une bonne raison de le terminer comme il faut. Le seul où j'ai lâché, c'est au Havre. Au bout de cinq morceaux, je me suis dit, mais qu'est-ce que je fous là ?

Marie : Moi si le public est amorphe, j'y vais encore plus. "Ah il ne réagisse pas sur celui-là, attendez vous allez voir sur le prochain". Je donne encore plus d'énergie, du coup je me vide, ce qui n'est pas forcément mieux... Il faut avoir un peu de recul, ce n'est pas évident, un peu d'humour par rapport à certaines situations, il vaut mieux en rire.

Olivier : Ca dépend aussi de l'accueil que tu reçois dans une salle. Au BBC à Caen, l'ambiance l'après-midi était vraiment bizarre. Alors quand on est monté sur scène, on était vraiment moins excités que le public. Il y a tellement de paramètres qui rentrent en jeu.

Marie : Pour nous aider, nous motiver dans ce genre de situation, il y a le morceau que met Ste (le technicien son) lors de notre entrée sur scène et puis aussi la compilation qu'il met pendant le changement de plateau. Ca nous met vraiment en condition.
Après sur une vingtaine de dates, on a quand même connu plus de moments magiques, que de moments où on se demandait ce qu'on foutait là. Heureusement.
On a tellement l'habitude d'avoir une réaction que le jour où on tombe sur un public statique, on se pose des questions.

Q : Est-ce que le passage du studio à la scène vous a demandé un effort particulier ?

Olivier : Ca demande du travail, oui, ça dépend des morceaux. Honnêtement, je pensais que ce serait plus compliqué que ça. Pour cette tournée, il y avait certains morceaux que nous n'avions jamais joué sur scène, notamment le diptyque It's not easy / To be your friend. J'ai été étonné qu'on l'adapte aussi rapidement. Je pensais qu'on allait en chier.

Guillaume : (rires) Tu pensais qu'on allait en chier ?

Olivier : Oui.

Marie : Après l'enregistrement, on s'est mis dans notre local de répétition... Il n'y a pas eu beaucoup d'arrangements à faire. C'était plus une question de rodage. Ce qu'on a fait sur les trois premiers concerts. Bon je ne parle pas de Paris (j'y étais gros souci de son dans la salle et eux-mêmes ne s'entendaient pas). Mais ceux de Reims, du Grand Mix (Tourcoing), et d'Amiens nous ont permis de trouver nos marques.

Guillaume : Il n'y a pas d'énormes différences entre le studio et la scène. Les morceaux ont tous été joués live lors de l'enregistrement. Ils ont tous été composés dans notre local. On a su les jouer assez vite. Les versions studio sont juste plus élaborées, quelques arrangements supplémentaires.

Q : Est-ce qu'il y a un morceau ou plusieurs qui sont plus difficiles à jouer ?

Olivier : It's not easy me faisait peur. J'ai fini par trouver une feinte au milieu. Avant j'avais vraiment peur. Je ne savais pas comment j'allais le terminer, comment nous allions le terminer.
C'est une question de pratique. Après il y a des problèmes d'écoute qui peuvent intervenir. Si on ne s'entend pas, ça peut devenir bancal. Alors on pallie par l'énergie. On trouve toujours un moyen pour que le morceau reste debout.



Q : De quelle manière abordez-vous la scène ? Suivez-vous une ligne de conduite précise, une philosophie ? En tant que spectateur, je suis toujours très impressionné de vous voir jouer. C'est massif, c'est intense. On se le prend en pleine gueule.

Olivier : Personnellement, j'essaie de trouver un juste milieu entre le fait de bien jouer le morceau, de faire chaque partie comme elles ont été écrites et doivent être jouées, et le fait de me laisser porter, parce que je me trouve en concert et que, des fois, tu donnes un peu plus, tu fais quelques variations, dans ton intention. Parfois tu vas jouer les choses de manière plus joyeuse que sur disque ou inversement de manière plus méchante. Mon idéal c'est de trouver un juste milieu et ce n'est pas toujours évident.

Marie : Je suis dans l'idée de partager quelque chose. Je ne peux pas faire les choses à moitié, je ne peux pas faire semblant. Quand je sens qu'il n'y a pas de complicité avec les gens, j'essaie de ne pas baisser les bras et à la rigueur l'hystérie est encore plus forte.
Je ne peux pas concevoir un concert sans interaction. Ne serait-ce qu'un sourire. J'ai besoin de ça. C'est la même chose avec Olivier, Guillaume et Matthieu. Je me sens super mal si je sens qu'ils ne sont pas là, si tout le monde est renfermé.
Je vois ça vraiment comme un échange, quelque chose de franc et sincère, pas fait à moitié.

Olivier : Si il y en a un parmi nous qui est moins bien, pour x raisons, corde cassée, retour pourri, ou fatigue, on le sent direct. De la même manière qu'on sent le courant qui passe avec le public, on le sent quand il passe moins entre nous certains soirs. Alors on se regarde, on se fait sourire, pour aller chercher l'autre. Je suis assez d'accord avec Marie sur l'idée de partage. Envoyer, recevoir.
Je peux me laisser facilement désarçonné à ce jeu là. Parfois je me rends compte qu'il se passe quelque chose avec le public et je ne pense plus du tout à ce que je fais. Dans ces cas là, je me dis qu'il faut essayer de profiter de cet échange là, mais je m'efforce de continuer à jouer de la bonne manière, que je sois fier de ce que je fais. C'est important, je veux être fier de moi en sortant de scène.

Q : Vous avez l'air très sérieux, très concentrés quand vous jouez. On se demande si vous vous amusez. D'autant que vos compositions sont assez sombres.

Olivier : Non, non, on s'amuse, mais c'est clair qu'on n'a pas des dégaines de branleurs. Les morceaux nécessitent une certaine rigueur avec nos instruments.

Marie : Par rapport aux deux premiers concerts que tu as vu cette année. On était effectivement très concentrés. A la Maroquinerie, particulièrement. C'était le tout premier, il fallait que je joue correctement les morceaux, et penser à ne surtout pas faire d'erreurs.

Q : Est-ce qu'il y a de la place pour l'imprévu ?

Mathieu : Il n'y a pas vraiment d'imprévu. Tout est quasi écrit. Le seul imprévu c'est la longueur des morceaux. Pour It's not easy to be your friend et sur Don't take a chance, il y a de longues plages instrumentales qu'on peut moduler. Sinon il n'y a pas d'improvisation.

Guillaume : On s'était dit qu'on essaierait d'aménager des passages d'improvisation dans notre set, mais finalement... On a improvisé dans notre local de répet et les impros sont devenues des morceaux qu'on joue. Il y a très peu d'imprévu dans notre show.

Marie : Il nous est quand même arrivé d'improviser en live, c'est arrivé sur certains concerts. Et ce sont des improvisations qui sont devenues des partitions, on les a retenus.

Q : Est-ce qu'au fil de la tournée, il y a des morceaux qui ont évolué malgré tout ?

Marie : Sur It's not easy, on s'est rendu compte qu'il y avait un break difficile à tenir, physiquement. Du coup, en répét' on a rebossé le morceau à partir de ça. C'est souvent des problèmes physique ou technique plutôt qu'un choix artistique. Par exemple, à tel moment, on entend moins la voix, alors on aménage.
Words, on l'a beaucoup changé. C'est le premier morceau de l'album et le premier aussi qu'on joue en concert. Au niveau de l'écoute sur scène. Ca n'allait pas. Or on voulait un premier morceau, sur lequel on ait tous nos repères, surtout pas du brouillon, de l'approximatif. On a donc changé la partition.

Olivier : On ne voulait pas être désarçonné par le premier titre du set. Même dans le local, on n'était pas satisfait de ce qu'on ressentait sur ce morceau. On se fatiguait plutôt qu'autre chose.

Q : J'ai remarqué que vous avez complètement réarrangé Karl Heinz Mücke. A Reims, je l'ai entendu en rappel et elle était méconnaissable. Vous en aviez assez de la jouer ?

Marie : Oui. Et puis elle ne correspondait plus à notre set. Elle était trop gentille. La même chose pour Rejoice qu'on a réintégré avec des changements, I need aussi.

Guillaume : Into perfection, elle, est restée dans sa forme initiale.

Q : Pourquoi ces changements I need et Rejoice ?

Marie : Elles ne nous correspondaient plus. On voulait les modifier. Je suis tombé sur une une ligne de clavier, les garçons ont trouvé une ligne de guitare, j'ai abandonné la voix, du coup Olivier s'est retrouvé tout seul pour le chant.

Olivier : I need quand on la refait, c'est en deuxième rappel. On a essayé de la mettre plus bas dans le set, mais elle parait trop gentille. En deuxième rappel, la position n'est pas trop mal. C'est aussi histoire de retrouver un peu d'excitation à jouer des morceaux qu'on ne joue plus depuis longtemps.
Ca donne aussi l'occasion de se replanter. C'est là qu'elle est l'improvisation, quand je fais la fin du morceau, trente secondes trop tôt. (Rires)




Q : Est-ce qu'il y a des groupes sur scène, qui vous ont impressionné, des modèles ?

Guillaume : Le concert le plus impressionnant que j'ai vu, c'était Einztürzenden Neubauten. Ca n'a rien à voir avec Gomm. C'était un concert marquant. En 1993, au théâtre de Sébastopol (Lille). Et puis, il y a aussi Dog Faced Herman's. L'un des meilleurs que j'ai vus, dans un petit club, avec trois musiciens et une fille. C'était super.

Olivier : Dans le passé, ce n'est pas du tout un de mes groupes préférés, Primal Scream à l'ancien Aéronef. Il n'y avait que 200 personnes. A l'époque de Screamadelica. Un concert super dance avec des lights partout. Un de mes meilleurs souvenirs concerts, alors que je n'écoute quasiment jamais ce disque. J'avais eu l'impression de me retrouver dans une boîte de nuit. C'était terrible. C'était un mélange de dance music, de Rolling Stones et de je ne sais pas quoi.
Dans les trucs plus récents, ce qui m'a vraiment impressionné, c'est The Ex, pas pour la technique, mais pour la générosité et la simplicité. Voir tout un public avec le sourire en train de danser, personne qui se prend la tête, un truc très, très sonique et remuant à la fois.

Marie : Un de mes groupes fétiches, c'est Blonde Redhead. J'en parle assez régulièrement. Ca ne m'arrive pas souvent de voir un concert où je ne me positionne pas en tant que musicienne. Quand tu fais de la musique, tu vois les choses avec ton regard de musicien. Tu penses au son. Ton esprit vagabonde. Tu t'imagines en train de composer les morceaux. Enfin, bon bref. Ca parasite un peu. Alors quand tu es devant un groupe qui parvient à te faire oublier tout ça et de te retrouver comme un spectateur lambda. C'est vraiment bien. Avec Blonde Redhead, il y a un truc qui se dégage, c'est au-delà de leur musique. Ce qu'ils dégagent physiquement sur scène... Je trouve ça hyper impressionnant.
Pareil, j'ai vu qu'une seule fois Sonic Youth. Il y a quatre-cinq ans. Je me suis dit. Ah ben ouais !

Mathieu : en même temps, pour moi, j'étais aussi là, c'est un de mes pires souvenirs (je n'ai pas compris pourquoi).

Guillaume : c'est vrai ? Moi, j'étais fan. C'était la première fois que je les voyais.

Q : Quel est le plus beau compliment qu'on vous ait fait après un concert ?

Olivier: J'adore ton univers. Thanks for the add.

Marie: C'est les gens qui viennent discuter avec nous et qui achète le premier et le deuxième album.

Guillaume : A Angoulême, il y a un gars qui est venu nous voir. Il nous a dit que ce n'était pas son genre d'être fan. Il n'allait jamais parler à la fin avec les musiciens. Mais ce soir, c'était trop fort, il est venu nous voir. C'était la deuxième fois qu'il le faisait et la première c'était pour Fugazi.

Marie : c'est les gens qui nous disent que notre concert ça marqué un moment important de leur vie, où ils étaient dans une salle ambiance, quelque chose de triste et que ça leur a donné la pêche pour surmonter ça.

Guillaume : Plein de fois ça nous arrive d'avoir des gens qui nous disent, je ne connaissais pas du tout, je suis venu comme ça, j'ai adoré, j'achète votre Cd. C'est super important de te rendre compte que tu es arrivé à faire passer quelque chose. Les gens ne connaissaient pas du tout tes morceaux. Ils ne sont justement venus pour écouter des morceaux qui ne passent pas à la radio. Et tu as réussi à venir les chercher, à les convaincre.

Olivier : Ce qui me marque le plus, ce n'est pas félicitations d'après concerts mais les regards pendant les concerts. Parfois tu peux bloquer une seconde sur quelqu'un et tu sens qu'il est complètement dedans, qu'il te regarde toi ou quelqu'un d'autre. Il a l'air en même temps fasciné, dedans, un truc que je ne veux pas essayer de décrire.

Marie : Il y a les danses aussi.

Olivier : Je suis un peu moins touché par les danses.

Mathieu : Moi, j'aime bien les danses des chamanes.

Guillaume : Il y a des chamanes ?

Mathieu : Oui, généralement, c'est des mecs aux cheveux longs, tatoués, qui finissent torse nu. Ils ont la cinquantaine.

Olivier : Il y a un truc aussi. Qui m'a réconforté sur notre manière d'agir. C'est un père et sa fille. Ils avaient apprécié à fond le concert pour des raisons différentes. Le père était fan de Magma. Il trouvait du Magma dans Gomm. Moi je veux bien, mais bon... Et la fille était fan de Placebo. Tu te dis que tu peux toucher deux générations avec la même musique. C'est intéressant. Ils avaient tous les deux le même sourire.

Marie : C'est ce qu'on constate là après une vingtaine de concerts. On n'a pas un public type. On peut toucher aussi bien des ados de 17 ans, et énormément de gens qui ont 40-50 ans. C'est un peu surprenant. Mais quand on réfléchit un peu. C'est des gens qui avaient 20 ans en 1977. Qui ont une culture rock assez pointue.

Q : Un compliment qui aurait pu vous hérisser ?

Marie : La phrase type, "c'est sympa ce que vous faites".

Mathieu : "C'est spé".

Guillaume : "C'est en place".

Marie : Ah non, ça on ne nous l'a jamais dit, mais nous, nous l'avons dit à d'autres groupes. A la rigueur, on préfère un silence qu'un truc qui sente le mitigé.

Q: Que peut-on vous souhaiter pour l'avenir ?

Olivier : Des concerts. Pas forcément des tournées de trente dates. Même si ce serait sympa. On aimerait défendre le disque hors des frontières. Notamment en Belgique où il est sorti. En Suisse aussi.

Guillaume : On a eu des propositions pour la Roumanie (effectivement, ça s'est confirmé ils y seront le 21, 22 et 23 juin).

Mathieu : C'est vrai ? Je n'étais pas au courant.

Guillaume : C'est avec l'ambassade. Ce serait trois dates en juin (effectivement ça s'est confirmé).

Marie : En gros que l'album vive le plus longtemps. On a misé toute l'année 2007 dessus. C'est sûr que si par la force des choses, il y avait moins de concerts, je serais déçue, même si c'est une réalité que les albums vivent de moins en moins longtemps dans les bacs et que les groupes sortent de plus en plus vite des disques, tous les deux ans.

Olivier : Dans la mesure où on est assez fier de ce disque, on a envie de le faire vivre le plus longtemps possible sans forcément se dire on va en vendre 30 000 exemplaires.
Si dans quatre mois, on se met à faire des maquettes pour un troisième album. Bon... tant mieux. Ca veut dire qu'on recréé. Mais c'est comme si on avortait celui-là. Moi, j'ai envie que le plus possible de monde l'écoute et se fasse un avis. Même si cet album peut continuer de vivre après le troisième. On peut continuer à jouer des morceaux sur scène. C'est vrai que nous-mêmes on cite encore le premier et le deuxième album de groupes qu'on aime bien. Mais c'est vrai que si on peut encore continuer à le défendre ce serait bien.

Q : Rien d'autres à ajouter ?

Marie : Si tu connais des gens qui voudraient nous confier des films, des documentaires pour en faire la bande-son, ça nous intéresserait beaucoup. C'est un appel.

Mathieu : Un appel d'offres !

Marie : Ce serait un truc épanouissant.

Guillaume : On l'a déjà fait en 2000 pour un documentaire sur Augustin Lesage (1876-1954, un mineur devenu peintre après avoir entendu des voix).


NdPh : Je me permets d'ajouter à cette excellente interview qu'au moins 3 personnes parmi les 3 chroniqueurs et photographes les plus réguliers de LiveinMarseille, sont gravement accros à Gomm, en témoignent une moultitude de chroniques dithyrambiques et enthousiastes au delà du raisonnable. Gomm, c'est pas franchement sympa ce qu'ils font, juste ça déchire.

 Interview réalisée le 12 juin 2007 par Bertrand Lasseguette