Accueil Chronique album : Hemlock Smith - Keep The Devil Out Of Hillsboro, par Phenix
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Critique d'album

Hemlock Smith : "Keep The Devil Out Of Hillsboro"

Hemlock Smith :

Pop - Rock

Critique écrite le 14 mars 2011 par Phenix

On a souvent voulu voir en Hemlock Smith un groupe cinématographique. Allez savoir pourquoi. Pas rancuniers, les Veveysans ont choisi de prendre l'observation au pied de la lettre. Et se sont embarqués l'année dernière dans la mise en musique de "Sir Arne's Treasure", film réalisé en 1919 par le suédois Mauritz Stiller. Un projet comme pour régler une fois pour toutes ce "malentendu cinématographique". Mais pas seulement.
Car avec Keep The Devil Out Of Hillsboro, son troisième album studio, Hemlock Smith prouve que cette expérience lui a également permis d'affiner les contours de son univers, entre songwriting délicat et arrangements variés, jamais ostentatoires. En une formule, le groupe raffermit son identité musicale, jouant de la large palette offerte par le folk. Et réconcilie les ombres tutélaires qui nourrissent sa musique, de Tom Waits à Mark Hollis, en passant par la country classieuse de Lambchop et le rock érudit de dEUS.
Cet alliage réussit se manifeste en premier lieu dans la qualité des instrumentations. Impressionnistes, composites ou encore abondants, les arrangements fascinent par leur capacité à laisser respirer les chansons tout en les rhabillant. Accordéon, banjo, violon et chœurs rehaussent ainsi les compositions initiales, sans jamais les étouffer, insufflant ici une dérive jazz qui évoque Mingus ("Family Tree"), là un blues terreux ou une valse de cirque triste que n'aurait pas reniés Nick Cave ("Blink" et " Dunkirk/Jerusalem").
Quant aux titres les plus dépouillés de l'album, ils profitent également de cette écriture assurée. Construits autour d'une guitare légère ou d'un piano feutré, se délitant au rythme d'une basse et d'une batterie parfaites de délicatesse, ils sont portés par la voix si particulière de Michael Frei. Conteur ou crooner, le chanteur d'Hemlock Smith module son phrasé d'un morceau à l'autre, jouant d'un lyrisme lent ou maniéré, retenu ou magnétique. Surtout, il parvient à épouser la subtilité des instrumentations, à l'image du troublant "The North Sea", hommage au pianiste suédois Esbjörn Svensson disparu l'année dernière, dont la mélancolie aqueuse évoque plus qu'elle n'imite la figure célébrée.
A la manière de ce titre à part et pourtant emblématique de la mue effectuée par Hemlock Smith, Keep The Devil Out Of Hillsboro présente un groupe aux reliefs plus aboutis, riche des expériences passées, maître de son dessein musical. Pleines d'une beauté humble, les chansons d'Hemlock Smith ne devraient plus pâtir de la comparaison cinématographique. Leur magnétisme seul suffira désormais à nourrir les imaginaires.

 Critique écrite le 14 mars 2011 par Phenix
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