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Chronique de Concert

Miss Hélium, Aido Music System, Zik2Bouch, Volfonis

La girafe, Reims 4 novembre 2006

Critique écrite le par

En préambule, un petit détour par la Cartonnerie. Il y avait les Saints, des vieux Australiens, et pour ouvrir la soirée The Volfonis, des pas jeunes, de Reims. Son chanteur Thierry s'agite aussi avec les Poseurs, un groupe de reprises punk-rock. Ca dépote, j'aime bien. Les Volfonis, ça dépote moins, j'aime moins.



C'est du rock énergique dans la veine des Dogs, ce groupe de Rouen (1973-1983), qui perpétuait l'asservissement des jeunes français aux rythmes anglo-saxons commencé avec les yéyés, avant que les Béruriers Noirs, puis la Mano Negra viennent enfin situer la France sur la carte du rock (j'adore quand je suis définitif comme ça, moi qui ne sait même pas jouer correctement de la flûte à bec).
Les Volfonis m'ont quand même surpris avec leur dernier morceau. Zig Zag Wanderer. J'ai tout de suite compris qu'il s'agissait d'une reprise. Mais je tiquais. Je n'imaginais pas qu'ils connaissent les Roger Sisters. Alors quand je suis rentré chez moi, tard dans la nuit envapée, j'ai vérifié sur le premier album de ces jeunes américains. Le morceau est crédité à Vliet/Berman. Merde, c'est Captain Beefheart sur un disque que j'ai en plus, Safe as milk (1967)!

Du lait, c'est ce que buvait mon voisin de canapé à la Girafe. Un punk avec le blouson, la crête, les chaînes, un super pantalon à motifs écossais et sa punkette assortie. Très amical, il me propose de goûter son lait. Non merci. Moi, c'est juste le matin avec mes céréales. Devant son insistance, je consens à approcher mon nez, pour le reculer aussitôt, merde, c'est du rhum, mais ça je n'en ai pas chez moi.
La Girafe est un squat situé dans les anciens Docks Rémois, à 500 mètres de la Cartonnerie. J'y suis allé pour découvrir un groupe d'excités, Miss Hélium. Et en fait, j'ai découvert deux groupes d'excités, plus un mariolle grand style. Le mariolle, c'est Arno Lehman et l'autre groupe d'excités, c'est le sien Aido Music System.
La soirée a débuté à 22 heures. Un type en nuisette, les couilles au vent, s'approche d'un micro. De derrière, on entend le son d'un garçon imitant une voix de femme, une voix de femme asiatique, une imitation de geisha. C'est l'intro du spectacle. C'est l'intro du type en nuisette avec un batteur aussi. Un batteur discret. Une première chanson: Indécision.

C'est tout le temps pareil.
Je ne sais ce que je veux
.

Un deuxième titre, 40 secondes:

Il est 14 heures.
Tu n'es toujours pas levé.
Il est 14 heures.
Tu ferais bien de te réveiller.
Il est 18 heures.
Faudrait bien te réveiller
.

Il y a eu comme ça cinq vignettes de poésie absurde, mais tellement vraie comme souvent avec la poésie:

Les femmes c'est dur.
C'est comme les cailloux.
Moi je préfère quand c'est mou
.



Après un bref intermède au bar. La suite se présenta sous la forme d'Aido Music System, soit le type en nuisette avec un pantalon, Arno Lehman, plus trois autres, Cyrille Mohin-guitare, Simon Prim-batterie, Laurent Mézino-basse. Le groupe au complet, j'eus alors une illumination. Mais je les connais, je les ai déjà vus! C'était à la fête de la musique, un groupe de tordus métalliques avec un chanteur habillé en nounours.

"Les chansons qu'on vous joue sont issus de trois spectacles à thème, la premier sur la prison, le deuxième sur la psychiatrie et le troisième sur la révolution de 17 000." Aido Music System, c'est un peu comme si un groupe d'aliénés se mettaient à faire de la musique engagée. Ils jouent très vite, assez violemment, dans la tradition des tous premiers groupes de hardcore (Bad Brains, Black Flag) avec une nette influence métal. Arno et Cyrille, le noyau dur du groupe, ont des regards de parfaits fous. Le genre d'égarés qu'on croise assez régulièrement dans les grandes villes et dont on s'éloigne par instinct de conservation. Ils sont terrifiants. Leur musique est objectivement hideuse. Mais c'est original. L'ensemble, musique et chant (hurlé), mérite qu'on s'y attarde un peu. On y trouve d'authentiques brûlots contestataires, comme cette chanson anti-Sarkozy :

La France de Sarkozy
Vingt ans de prison pour délit d'opinion
Trente ans de cachot pour dire merde aux fachos
C'est la solution d'un pays d'exception
La France de Sarkozy
La France d'en haut,
La France d'en bas
Tu trimeras toute ta vie pour crever dans l'oubli
Tu plieras la tête pour rester dans la fête
Tu n'bouffent que les restes que les puissants te laissent
Y'a pas de solution,faut pas t'faire d'illusion
Le grand soir il est bon pour le placard
J'n'aurais qu'un conseil soumets toi au système.


Et des choses plus curieuses comme Lénine :

Lénine
Ta révolution
Sauras-tu la sauver ?
Lénine
Ta vie
Sauras-tu la justifier ?


Une autre, Red riot, dresse le portrait de Saint-Pétersbourg au cours des Dix jours qui ébranlèrent le monde, en 1917, lors de la révolution d'Octobre, quand "les soldats abattent les mauvais officiers". Enfin, une dernière, Jour de lumière, nous transporte dans la cellule d'un condamné à mort qui se rappelle le jour heureux où il avait aidé une vieille dame à traverser la route. Manque de chance, on l'avait vu, il était noir, quelque temps après la mamie était retrouvée morte assassinée, suspect évident, pourtant innocent, il est arrêté et condamné. Le fond des chansons est plutôt sérieux et militant, mais la manière dont Arno introduit chaque titre, la fougue hallucinée avec laquelle il les interprète rend le spectacle désopilant. A voir et plutôt deux fois qu'une.

La barre avait été placée haut dans le désordre et l'arrivée de Miss Hélium sonna finalement comme un retour à la normale, vers une musique plus classiquement punk. Enfin... à première vue, car derrière les apparences d'une musique festive, se cache un véritable appareil de propagande au service de l'anarchie.
Miss Hélium (prononcez mycélium) se présente ce soir sous la forme d'un trio, deux guitaristes entourant, un chanteur, Tof, avec quelque part, un lecteur Cd, pour envoyer une rythmique techno digne d'une free party. Ces héritiers des Béruriers Noirs porte un discours ultra-radical anti-travail et anti-consumérisme.

La consommation
C'est le moteur de la machination
Le pognon
C'est la clé de l'illusion
Pour échapper au capital
Quitte ton travail
Et rejoins l'armée des fauchés
En quête d'une autre réalité


Et Tof de conclure à la fin de ce morceau contre la banque mondiale, "Maintenant j'ai un camion, un chien, un accordéon et je trace librement ma route", et il nous encourage à en faire de même, dès lundi (nous sommes un samedi soir). Quelqu'un dans le public, vient lui objecter que ce n'est pas si facile quand on a des enfants. Le chanteur lui répond du tac au tac que c'est un faux problème, qu'ils "adorent ça les gosses, voyager, se rouler dans la boue."



Ah... oui, c'est du sérieux, Miss Hélium. Des vrais de vrais, qui sentent sous les bras. Ils refusent de s'inscrire à la Sacem, leurs titres sont en téléchargement libre et ils font la route, de squat en manifestations de rue, vivant de peu, toujours en marge d'un monde qui court à sa perte.
La société me dégoûte
Le travail me gave
L'ordre et la morale
Me font péter un câble
Mother punk fucker
Je fais une crise punk
Je veux de la bière
Je veux des concerts
Je veux faire la fête
A en perdre la tête
Mother punk fucker
Je fais une crise punk
Je suis allé voir un doc
Il n'avait pas de médoc
Je suis allé voir un psy
Il m'a conseillé la lobotomie


Après ce lavage de cerveau libertaire, un dernier intervenant vient finir de nous assommer avec du beatboxing. Zik2bouch, soit un garçon, Nordine je crois qu'il s'appelle, avec sa bouche et un micro. Il avait des copains dans la salle pour l'encourager dans ses prouesses. C'est gentil de leur part, mais ils n'étaient vraiment pas obligés. C'est sympa sur deux-trois morceaux, mais au-delà ça devient du vice, quel que soit le talent de l'intervenant, et Nordine n'en manquait pas. Il sonnait comme une machine.


PS: je n'ai pas de photo valable de Zik2bouch par manque de batterie sur mon appareil, c'était le quatrième concert d'affilée et j'avais oublier de la recharger.


Site d'Aido Music System: https://aidomusicsystem.googlepages.com/

Pour se démonter la tête en téléchargeant des titres d'Aido Music System appuyez ici

Site de Miss Hélium: https://miss-helium.org/














 Critique écrite le 05 novembre 2006 par Bertrand Lasseguette


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