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Chronique de Concert

Bob Dylan

Perpignan 12 juillet 2006

Critique écrite le par

Juste quelques mots pour répondre aux critiques négatives (car moi, j'ai a-do-ré !). Elles portent toutes sur 2 points qui en fait n'en font qu'un: le statisme de tout le groupe, et l'absence de communication chaleureuse de Dylan avec le public. Bien sûr, tout est affaire de goût. Mais aussi de formation (qui d'entre nous aimerait réellement Picasso si on ne nous avait pas rebattu les oreilles avec son génie, si on ne nous avait pas dit, surtout, qu'il faut apprendre son langage ?) Je prétends, moi, que Dylan est très bien avec le public. La seule chose qu'il faut comprendre, c'est la grammaire de ses prestations, à savoir un sacrifice d'absolument tout au seul intérêt supérieur de sa musique transcendée sur scène par le jeu et rien que par le jeu. Voilà pourquoi il en fait des tonnes dans... le minimal. A peine un salut final (même chose à Montauban il y a deux ans), un mince rappel, une arrivée sur scène aux antipodes des shows genre Stones ou U2. Des musicos affûtés qui ne doivent parcourir que l'équivalent d'un mouchoir de poche dans l'heure et demie du concert, ne regardant que leur instrument et l'oeil impérieux du Maaaaaître, lequel les tient comme dans un goulag. Oui, cent fois oui. S'imagine-t-on qu'un type de ce calibre ne SAIT pas faire dans le genre concert enflammé et déchaîné ? Il a joué devant 200 000 personnes à l'Ile de Wight, il tourne depuis 40 ans, il n'a jamais mégoté sur les conditions. Il se pointe, il joue un répertoire en constante évolution (certaines chansons méconnaissables, mais on apprend énormément sur la plasticité du matériau, c'est fascinant), et il a même l'"aguante", pour prendre un terme tauromachique, de commencer à jouer alors qu'il fait encore jour, et que des retardataires sans-gêne arrivent du restau ou de la plage la bouche en coeur largement en retard, en passant devant la scène. Lui s'en fout, il a permis un petit retard, OK, il a été gentil, mais maintenant à chacun de prendre ses responsabilités. Bob prend sa tisane à 23h, et au lit. Il est là pour la musique, point. Donc, pas de malentendu: ce n'est ni paresse ni timidité (de quel public aurait-il peur, depuis 40 ans ?), ni jem'enfoutisme : ce qu'il propose, c'est une forme très rare de concert. Pas une communion hystérique (même si je concède qu'elle a son intérêt, c'est très bien de se déhancher en gueulant tous ensemble), mais une communion PAR LA MUSIQUE, car le respect s'accroît avec la distance. Quant à dire qu'alors il vaut mieux écouter les disques, l'argument ne tient pas : d'une part la set-list change tous les soirs (cf. le site bobdylan), d'autre part l'interprétation d'une même chanson évolue au fil du "never ending tour".

J'ai vu de très gros concerts (U2 à Vincennes, par exemple), et là c'était l'arnaque: une marée humaine, une attente interminable et un son saturé ; ici, au contraire, un son absolument parfait, ni trop fort ni faiblard, mais parfaitement dosé, aéré, avec une respiration de tous les pupitres. C'est rigoureux, tiré au cordeau, et en petit comité. On en sort les oreilles lavées, avec le vrai pur son américain. Dylan n'est pas une star (il laisse ça à Garou et Robbie Williams), il est tout simplement une référence. Learn his language, and all will be OK...

 Critique écrite le 13 juillet 2006 par xave