Accueil Chronique album : Rover - Rover, par Philippe
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Critique d'album

Rover : "Rover"

Rover :

Pop - Rock

Critique écrite le 06 avril 2012 par Philippe

En voici un qu'on a pas vu venir, surtout de la scène française : un auteur-compositeur en langue anglaise, au look atypique et au prénom charmant, qui débarque avec un album immédiatement marquant. Avec son physique mi-bucheron, mi-poète romantique, Timothée Regnier se met en scène dans un caban sombre digne de Charles Baudelaire, devant et même dans un lac sombre, perdu dans des montages couvertes de conifères. Nom du personnage et de son album, Rover, ambiance tristesse et solitude, soulignée par un regard mélancolique appuyé sur la couverture : un peu too much peut-être ?
Et pourtant à l'écoute de Rover chantant Rover, une question qui nous a longtemps hanté nous revient : comment se fait-il que certains chanteurs nous fassent immédiatement vibrer les entrailles, alors que ni leurs voix, ni leurs mélodies ne sont ostensiblement tragiques, ou grandiloquentes, ou follement originales ? Parce que dans le style "petites chansons bouleversantes", certes terrassé par l'ombre portée immense de Johnny Cash, on avoue avoir vibré presque autant à l'écoute des modestes compositions de Sean Lennon, de Micah P Hinson et autres Vic Chesnutt, Daniel Johnston etc... Il ne faut même pas trois chansons pour comprendre que Rover nous fait le même effet, fut-il chargé de tout le poids de ses influences évidentes.
On avait bien lu ici ou là que Rover était trop imprégné de David Bowie et des Beatles... La belle affaire ! A l'heure où l'on parle sérieusement de former des Beatles "next generation" avec leurs rejetons respectifs (quelqu'un a vraiment envie d'entendre ça ?), et en étant sans nouvelles (chansons) du Thin White Duke depuis bientôt 10 ans, on pourrait peut-être ne pas trop faire les fines bouches, les gars, ou bien ?
D'abord, avoir une voix proche de celle de David Bowie, c'est pouvoir évoluer sans problèmes, à l'aise dans le falsetto, comme dans cet irrésistible hymne glam disco, Tonight, et savoir déclamer dans la ligne claire et puissante de Remember, joyeuse déclaration à une amour morte. Et même, pouvoir faire revivre Ziggy Stardust, le temps d'un Carry On enflammé...
Ensuite, s'être approprié le songwriting et une partie du son Lennon/Mc Cartney, c'est pouvoir composer des balades supebes comme Queen of the Fools et des chansons d'amours efficaces (Lou), dont les textes sont franchement plus travaillés que les grands tubes des Beatles... Mieux encore, le Timothée s'invente sa petite place en mixant tout ceci, pour imprimer durablement nos oreilles avec des chansons "doucement poignantes", comme Silver, Champagne, Late Night Love, toujours du bon côté de la grandiloquence et du racolage-à-violons, auxquels il ne cède jamais. En atteignant Full of Grace, le "Singer in the Dark" a donc pratiquement réussi à faire oublier ses influences : ça y est, il s'est fait sa petite place, qu'on devine durable, sur notre playlist personnelle.... Et finalement, ce premier disque donne déjà pas loin de 13 bonnes raisons de foncer voir Rover en concert dès que possible !

(Cinq7/Wagram, 2012)
Vignette Philippe

 Critique écrite le 06 avril 2012 par Philippe
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