Accueil Chronique de concert Beechwood + Dude Low
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Chronique de Concert

Beechwood + Dude Low

Beechwood + Dude Low en concert

L'Ubu, Rennes 29 septembre 2022

Critique écrite le par



Après avoir inauguré sa tournée européenne la veille à l'Aéronef de Lille, les New-Yorkais de Beechwood ont imposé leur élégance de dandys trash à l'Ubu de Rennes, le 29 septembre. Une date qu'il ne fallait pas manquer, tant le groupe a marqué les esprits avec ses trois albums, devenant l'un des meilleurs représentants de la mythologie rock'n'roll. On parle bien de rock'n'roll, à une époque où tous les groupes sont qualifiés de post punk et usent - et parfois abusent - de rythmiques raides et sèches, comme de guitares tranchantes et répétitives. Avec Beechwood, on assiste au retour d'une musique violente et sexy, mélodique et fragile, révélant les failles et la force d'un combo ancré dans la réalité urbaine tout à la fois sordide et éclatante de Big apple. Ce trio devenu quatuor à la faveur de son éblouissant dernier album, "Sleep without dreaming", fascine par sa capacité à créer des chansons miraculeuses ; plus d'un se damnerait pour écrire un seul morceau de la qualité de "Front page News", "Boy before", ou "Melting Over You". On se dirige donc vers l'Ubu, excité et impatient comme rarement. Les locaux de Dude Low, en première partie, nous permettent de nous détendre agréablement en proposant une pop soyeuse et parfois éthérée, légèrement funky par endroit.



Lorsque le gang de Gordon Lawrence et Sid Simmons - tous deux guitaristes et chanteurs aux looks de Johnny Thunders pour le premier et de Steve Marriott période Small Faces pour le second - entre en scène pour délivrer une version compacte mais épique de "Heroin Honey", on est instantanément séduit par ce mélange de déglingue stylée, d'électricité cinglante, et surtout de mélodies imparables et sublimement touchantes. Le génie d'un artiste se révèle toujours par l'ambiguïté de ses œuvres, et Beechwood ne fait pas exception à la règle : la violence des morceaux cohabite toujours avec une mélancolie rêveuse, tandis que leur construction tubesque se mêle d'arrangements vénéneux et tortueux. Les influences punk sont nettes (on pense aux Heartbreakers ou aux plus récents Richmond Sluts) -, celles du glam plus rares (et elles nous ramènent plutôt vers les New York Dolls, ce qui ne nous éloigne pas vraiment du punk), mais il y a, dans l'équilibre branlant des morceaux, dans ces voix qui menacent de se briser, des réminiscences de Big Star, ce que ne démentent d'ailleurs pas les propos et l'illumination du visage de Gordon Lawrence lorsqu'on lui parle, après le concert, de cette influence.



Après ce début fracassant, le groupe alterne avec brio et une classe démente les titres de ses deux derniers albums - laissant curieusement le premier, le foutrement génial "Songs from the land of Nod" - de côté, et les nouvelles compositions. Les deux guitaristes et le bassiste, Jensen Gore, nous le confirmeront plus tard dans la nuit : ils viennent de terminer l'enregistrement de leur quatrième album, dont ils doivent finaliser quelques détails à la fin de la tournée, et leur nouveau single devrait sortir d'ici deux mois. C'est assez rare de voir des artistes proposer en tournée, et en grande partie, du matériel inédit, mais c'est le cas de Beechwood qui, de toutes les manières, ne semblent pas faire grand cas des convenances. D'ailleurs, ces nouveaux titres sont formidables : à première vue, aussi immédiats et efficaces que des morceaux comme "Front Page News". On retient surtout "Big City", le dernier morceau du show, sauvage et imparable.



Ce qui étonne, toutefois, c'est l'énergie furieuse du groupe tout au long du set : alors que les albums se caractérisent par une habile combinaison de bangers, de ballades déchirantes et de chansons mid-tempo cotonneuses et serpentueuses, le live de ce soir semble privilégier une approche plus directe et violente, même si "Rain" articule merveilleusement couplets rock et refrains pop (et quels refrains ! Certes, ce sont ceux de Lennon et McCartney, mais ils permettent, ce soir, d'entendre un appel plein de gratitude et d'espérance à la pluie rédemptrice et au soleil régénérateur, on en pleurerait !). On a beaucoup parlé de romantisme pour qualifier Beechwood, et l'on comprend pourquoi : tout bon romantique s'oppose à l'esprit de son temps, en espérant retrouver par certaines pratiques - artistiques notamment - une authenticité dans l'émotion et dans le rapport aux autres et au monde. Et c'est ce qu'on retrouve chez Lawrence et Simmons, les piliers et compositeurs du groupe : un désir de tourner le dos au cynisme, aux artifices et aux calculs de l'époque afin d'éprouver jusqu'à l'os les plaisirs et souffrances de l'existence.



En rappel, les New-Yorkais reviennent embraser la salle avec une reprise viscérale et explosive de "The Last Time", une belle manière de nous rappeler ce que les Rolling Stones faisaient probablement il y a 40 ans. Le public réagit (enfin), le groupe est à son apogée et l'un des guitaristes plonge dans la foule avant de quitter la scène avec ses acolytes, nous laissant pantelant, en sueur et aspergé de bière par notre voisin de derrière, que nous remercions malgré tout d'avoir fait preuve d'enthousiasme. On se dirige alors vers la sortie et le merchandising pour rencontrer le groupe au complet, avenant et souriant, disponible pour les questions, photos, cigarettes et bières partagées : la classe et l'élégance jusqu'au bout, que l'on retrouvera bien volontiers à La Lune Froide à Nantes, le 15 octobre, pour clôturer cette tournée européenne automnale.

Photos : Stéphane Perraux, www.facebook.com/stephane.perraux.5 lust4live.fr








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