Chronique de Concert
The Limiñanas
Les portes battantes du sas nous laissant entrevoir un concert entamé, l'ambiance dans la file d'attente commence à s'échauffer, qui à demander que l'on se dépêche de payer, qui à vouloir passer devant, prenant son billet pour un sésame d'impolitesse, qui à réclamer sa feuille d'adhésion pour soi-disant gagner un temps indubitablement douteux. Après cinq minutes de bousculade impatiente, je finis par m'engouffrer dans une salle comble, perturbant de quelques centimètres l'immobilisme hostile de fans déjà enracinés et chuchotant au collègue Nico, de peur de me prendre un nouveau coup de semonce, parce qu' "ici, on ne parle pas, c'est un concert !"
Que le monde se rassure et que les autres me pardonnent, j'étais bel et bien enthousiaste à l'idée de retrouver les Limiñanas s'en donner à cur joie avec leur nouvel album Malamore , tout fraîchement sorti dans les bacs à glaçons de France et de Navarre, six ans après leur premier album, éponyme, et ce titre Funeral Baby qu'ils n'oublient jamais de jouer, ce soir comme de coutume.
Tout de noir vêtu avec le line-up réactualisé featuring Ivàn Telefunken -le petit protégé de Pascal Comelade - à la guitare (à pois), aux maracas (à pois) et au clavier (à pois), ainsi qu'Alban Barate à la guitare soutien et au ukulélé fringuant.
Le plaisir d'avoir un groupe qui, en live, n'est pas qu'une fidèle reproduction de l'album enregistré. Les Limiñanas en live, c'est plus que de la pop vagabonde (avec la Grèce en point cardinal), c'est flamboyant et hypnotique, tout en garage fuzz et puissance sonique, saisissant tripes et tympans, avec un tempo martelé, souligné par la basse ronde et hypnotique de Mickey, porté par la voix cristal trouble de Nika -qui vient se substituer à la voix chuchotée de Lionel sur disque- et les cordes furieuses, accords plaqués ou note unique comme une sirène lancinante, à la Betty & Johnny .
Et puis, c'est le premier rappel qu'ils ne manqueront pas d'honorer, reprenant la note unique, déluge de wah wah et de fuzz à la frontière poussiéreuse de l'intensité, souligné par le stroboscope épileptique. Puis un second rappel où les Limiñanas puisent dans leur anciens trésors sortis tout droit de l'usine yéyé psyché Crystal Anis : Migas 2000 , I'm Dead , du temps noir et blanc où Lionel était rasé de près. Ils nous laissent sur un Je m'en vais tout en mélodie entêtante, mais la foule en transe, qui danse et filme avec des smartphones brandis comme des briquets, en veut toujours plus. Jamais deux sans trois, paraît-il. Alors le groupe balance sa dernière carte, sa claque ultime, un morceau salement Stoogien , Zippo , qui finit d'embraser la foule ; le ukulélé se frotte à un bottleneck, Nika troque sa voix contre un supplément cordes et les trois accords de Lionel se prolongent en vibrations physiques, mentales, cosmiques.
Sans transition, la soirée prend vite un tournant disco, Marie et Lionel finissent de signer des autographes tandis que le matos se remballe en un claquement de maracas. On s'est vite carapaté en face, ennuyer les serveurs débordés avec nos envies de bloody mary qui se sont soldées par des coups de pression. Et puis on observe, l'il trouble, la manuvre du camion 66 avec gyrophare intégré, direction l'hôtel à 57 kilomètres de là où un petit repos (et une grosse entrecôte sauce au bleu ?) les attend avant leur festival de Cannes personnel, deux concerts et une interview.
Il est temps d'aller se baigner
Plus de photos et vidéos par Pirlouiiiit qui passait par là entre La Passerelle et Casa Consolat par ici
Critique écrite le 15 mai 2016 par odliz
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