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Chronique de Concert

Sonic Youth

Nouveau Casino, Paris 20 avril 2006

Critique écrite le par


Quelle merveille internet quand même ! Et une carte bleue ! Qu'est-ce que c'est utile dites donc ! Sans eux, jamais je n'aurais pu assister à ce concert. Pensez-donc, Sonic Youth, au Nouveau casino, un club de la rue Oberkampf, pour leur seule date française avant longtemps, concert exclusif avec présentation des nouveaux morceaux de l'album à paraître en juin, Rather ripped. Sitôt que j'ai appris la nouvelle, j'ai pris mon clic et claquer en direct trente-cinq euros et vingt centimes pour obtenir le droit de glisser mon grand corps malade au milieu d'autres fans argentés.


J'avais déjà vu ce vieux groupe new-yorkais (25 ans de carrière). Deux fois. A l'Elysée-Montmartre, lors de la sortie de Washing Machine en 1995 et au fort de Saint-Père, à côté de Saint-Malo, l'été dernier, dans le cadre d'un festival. Les deux fois, j'étais resté sur ma faim. Trop court. Trop professionnel.
Cette fois aussi, je suis resté sur ma faim. Le concert fut plus long que les deux précédents, mais j'aurais voulu plus, et j'aurais voulu aussi autrement.


La veille, Sonic Youth avait joué à la Maison de la radio pour le Mouv', une jolie radio de jeunes qui fait l'effort de ne pas diffuser que de la musique marketée. La performance était retransmise en direct. J'en ai entendu la quasi-totalité. Depuis ma voiture. Entre Reims et Fleury-les-Rivières. Je ne connaissais pas. C'est bien joli. Je parle de Fleury-les-Rivières. Un village de viticulteurs, avec aussi de nouveaux lotissements et des jeunes qui s'éclatent en scooter et motos parce que ça monte et ça descend à Fleury-les-Rivières, et ça en deux roues, c'est agréable. A Fleury-les-Rivières, il y a aussi Monsieur Pinon. Un honnête homme. Serviable.


J'avais perdu ma carte bleue. Ce bijou de petite puce mignonne qui m'a permis d'être au Nouveau casino jeudi soir.
Monsieur Pinon a trouvé ma carte bleue, égarée sur un parking de la zone Farman-Pompelle, à Reims. Il a demandé au traiteur asiatique qui se trouve à proximité, si ce nom sur la carte, ça lui disait quelque chose. Le traiteur, il a dit non. Alors, en rentrant chez lui, Monsieur Pinon a regardé dans l'annuaire, sur internet. Il a d'abord cherché dans la Loire-Atlantique. Le numéro de ma carte commence par 49, et le sien, à Monsieur Pinon, il commence par 51, alors qu'il habite dans la Marne. Il pensait que ça avait un lien, un peu comme pour les numéros de sécurité sociale (la troisième paire de chiffres correspond au département de naissance). Il n'y pas de lien donc et pas de Lasseguette en Loire-Atlantique. Pour en trouver, il faut descendre la côte. Plein sud, jusqu'aux Pyrénées-Atlantiques. Y en a plein, au Boucau, à Bayonne, Anglet, Lahonce, Biarritz.... Et moi, je crois que je suis le seul à vivre en dehors du 64. Dans le 51, à Reims, là où monsieur Pinon a fini par me trouver. Quand il m'a appelé, j'étais déjà en ligne, sur mon portable, avec ma banque, pour faire opposition. Une belle chance de cocu...
En tout cas, merci Monsieur Pinon !


Sur le Mouv', Sonic Youth a joué la plupart des morceaux de Rather Ripped. C'est difficile de donner un avis précis sur des morceaux de Sonic Youth quand on n'a eu l'occasion que de les écouter deux fois. J'ai mis par exemple une dizaine d'écoutes avant de digérer et apprécier Dirty, un album que certains considèrent comme le plus commercial des New-yorkais. Bon, il est vrai que c'était alors mon premier contact avec une musique sensiblement différente d'INXS et de Midnight Oil, mes groupes favoris du moment.


Pour en revenir à Rather Ripped, j'ai l'impression que les New-Yorkais nous proposent là des choses plus excitantes que sur Sonic Nurse, l'album officiel précédent, où on flirtait plus d'une fois avec l'ennui. Cette fois, on repart sur les bases de Murray Street, l'antépénultième. Une noise apaisée, apaisante, des morceaux qui s'étirent mais dont on ne veut pas voir la fin. C'est beau. Sur le fond, il n'y a aucune révolution, ni même une évolution dans le style de la Jeunesse sonique. On reconnaît parfois des suites d'accords déjà entendus sur d'autres morceaux. L'inspiration se tarit. Ca arrive. Tout a une fin, il paraît, même la jeunesse. Mais ce n'est pas grave. Je ne vais pas reprocher à un artiste de se répéter artistiquement, surtout un groupe du calibre de Sonic Youth, qui a créé plusieurs excellents -de bout en bout- disques (Bad Moon Rising, Evol, Sister, Daydream Nation, Goo, Dirty). Ce qui m'ennuie plus, c'est l'impression d'assister à un concert déjà donné la veille.
C'est ce qui m'est arrivé, jeudi au Nouveau Casino. Sonic Youth a ce soir joué exactement les mêmes morceaux, dans le même ordre que la veille. Pareil pour les rappels. Ainsi en sus des inédits de Rather ripped, nous avons eu droit à quelques titres plus anciens de leur répertoire.


Stones, de Sonic Nurse, Sunday de One thousand leaves, deux morceaux bien dans le ton de leur nouveau style plus cool. Mais ils explorèrent aussi leur face plus énervé et plus sulfureuse avec Mote de Goo, Pacific Coast Highway de Sister, et trois vétérans de 1983 sur l'album Confusion is sex, Brother James, Making the nature scene et Shaking Hell.


Sur le fond, ils n'ont absolument fait aucune différence entre un concert gratuit et un concert où leurs fans ont déboursé plus de 30 euros, entre les néons d'un studio radio et l'obscurité d'un club, entre un mercredi et un jeudi. Décevant.
Déception d'enfant gâté ? Il faut dire quand même la vérité. Je n'avais jamais été aussi près d'eux. Le Nouveau Casino était le lieu rêvé, et, il fut le lieu rêvé pour assister à ce concert. Je les ai vus en vrai, à pouvoir les toucher. Et ce fut donc un moment très agréable. Le son était impeccable. Les interprétations des morceaux ne ressemblaient, en rien, à un exercice promotionnel. J'ai vu Thurston jouer de la basse sur Making the nature scene, avec Kim seule au micro incarnant une sorte de pythie rebelle et je suis sûr que c'était bien plus sauvage que lorsqu'ils jouèrent cette chanson pour la première fois, il y a plus de vingt ans. Les derniers morceaux étaient vraiment, vraiment inédits. Sur Do you believe in rapture, Thurston s'est fait installé un pied de micro supplémentaire pour pouvoir lire les paroles. Leurs sourires n'étaient pas non plus des figures de style. Ils étaient heureux d'être là, et cette joie était communicative, même si Kim Gordon avec son visage de vampire fait un petit peu froid dans le dos.


Non, on sentait que jouer de la musique ensemble est un passe-temps qui leur plait. Il fallait voir l'intensité du regard de Steve Shelley, le batteur. Pendant tout le concert, il n'a pas quitté des yeux Thurston Moore, guitariste et chanteur, et véritable âme du groupe. D'où j'étais placé, je pouvais difficilement photographier correctement les autres (Lee Renaldo à la guitare complète le quatuor), ce qui explique pourquoi c'est surtout Thurston que vous pouvez voir ici.


Très sage au début, avec de grosses lunettes qui lui donnaient un air d'élève studieux, le géant (il est très grand) n'a pas tardé à se vautrer sur sa guitare et à la malmener dans tous les sens, la branlant sous les yeux du premier rang, la brandissant très haut au-dessus de nos têtes, jusqu'à la plaquer au sommet d'une des enceintes qui surplombait le public, avant de la redescendre pour créer une série de larsens avec son ampli. Cela a duré un certain temps, en guise de final explosif.


Cela ressemble à un rite d'exorcisme, la guitare étant l'objet possédé par le démon bruit, mais ça n'est qu'un élément d'un spectacle répété des centaines de fois auparavant sur de multiples scènes, en différents endroits du globe, un peu comme Iggy et son torse nu, et si le groupe maintient son haut niveau d'activité (il y a les albums pour Geffen, un tous les deux ans, mais aussi les projets plus expérimentaux sortis sur son propre label SYR, sans compter les activités de chacun en solo ou en collaboration avec d'autres artistes), si donc le groupe continue à créer et jouer de la musique en public, il y a des chances que de nombreux autres après moi verront à nouveau Thurston brandir très haut sa six-cordes.

 Critique écrite le 24 avril 2006 par Bertrand Lasseguette


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